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Au salon : tous paysans !

Si vous vouliez rencontrer des agriculteurs, vous pouviez le faire sans aller Porte de Versailles : ils étaient des dizaines avec leurs tracteurs sur le pont Mirabeau… pour protester contre une technostructure qui entend d’en haut, depuis Paris - voire Bruxelles, réglementer minutieusement notre vie professionnelle. Elle nous donne un bel exemple de ce qu’il ne faut pas faire en matière de gouvernance. Au code du travail de 1 kg 500, s’ajoute un code civil et un code de l’environnement aussi épais. Ils pèsent sur les chefs d’entreprise de tous métiers, comme sur nos paysans. C’est pourquoi, nous avons quand même franchis les portes de ce 60ème salon de l’agriculture en quête de fraternité, car nous partageons les mêmes soucis et les mêmes espoirs.

Carburants

On se presse autour d’une énorme moissonneuse- batteuse « New Holland ». « Ça ne marche sûrement pas à l’électricité » nous dit un visiteur avec un sourire. En effet, les agriculteurs partagent avec le BTP et les transporteurs un gros souci. Le coût du carburant écrase leurs comptes de résultat.

A la clé, la disparition programmée du moteur thermique réputé climato-mortel. Le bio-éthanol produit à partir des cultures de betteraves et de céréales, une solution ? « Pour les agriculteurs sans doute » me dit Aubin sur le stand betterave-sucrière, « environ 55 000 y trouvent des débouchés, mais cela représente moins de 1 % de la SAU, et ne concerne les moteurs essence seulement » précise-t-il. Certains constructeurs livrent des véhicules équipés pour accepter le bio-éthanol. Pour les autres, l’adaptation coûte environ 1000 euros.

Frontières

La moitié des produits alimentaires que nous consommons est importée. A ceux qui s’indignent de voir notre pays envahi au nom d’accords de libre-échange et qui souhaitent des barrières douanières, on réplique benoîtement que ce serait bloquer nos exportations. Exporter, nos agriculteurs savent le faire ! Sans les vins et spiritueux, notre balance commerciale serait déficitaire. La Bretagne, « région la plus agricole de France, qui nourrit au-delà des frontières régionales et nationales » selon les mots d’André Sergent ; aide à l’auto-suffisance alimentaire en contribuant à nourrir 1 français sur 3.

Faut-il encore que nos entreprises ne soient pas pénalisées par des normes auxquelles échappent d’autre pays ! On pense aux normes européennes sur lesquelles nos

administrations en remettent une couche avec la notion « 0 pesticides », pourtant indispensables aux betteraviers dont la production chute, alors que nous importons du sucre.

La Fondation pour la Nature et l’Homme et INTERBEV plaident pour des mesures miroirs, qui consistent à réserver l’action au marché de l’UE à des productions respectant nos règles environnementales et sanitaires. A ce jour, peu de décisions politiques concrètes ont vu le jour.

Paysans et écolos

Une table ronde a réuni Éric Orsenna, Gaspard Koenig, J.M. Sereni, autour des « conséquences sur l’agriculture du changement climatique ». Des écolos n’hésitent pas à affirmer que les activités agricoles l’aggravent. « Limitons les productions agricoles et les troupeaux disent-ils ! » Soit, mais que mangera-t-on ? Nous risquons de manquer d’eau ? On peut la stocker ! Développons des cultures qui en consomment moins, telles que le chanvre qui exige peu d’eau et aucun herbicide. De plus, il procure à la construction un matériau de qualité. Passons sur d’autres mesures techniques. Chacun s’accorde à souhaiter que l’on progresse selon les critères de la nature. Le bon sens peut préserver notre agriculture comme il a, non sans errements, permis de conserver notre production d’électricité nucléaire.

Qualité et pouvoir d’achat

« Des conditions de travail et des prix dignes » réclame une pétition qui circule en ce moment sur la toile. Même écho au stand de la Confédération Paysanne où Eglantine qui nous reçoit, très courtoisement, énonce un voeu : « un revenu qui tout simplement nous permette de vivre de notre métier ». Elle dénonce les règles de la PAC, basée sur la surface et non sur les personnes employées, ce qui avantage les grandes exploitations. Cela confirme les méfaits des normes bureaucratiques imposées uniformément à des exploitations toutes différentes selon l’activité, la Région, etc.

A l’arrivée, côté consommateur, le pouvoir d’achat limite l’acquisition de produits dont les prix ont sensiblement augmenté. Acheter Français ? Certes, mais l’origine est-elle toujours mentionnée ? Et quels remèdes ? Des prix planchers ? Une TVA modulée ? ou encore le choix de chacun : différer par exemple l’achat d’un smartphone permet de s’offrir nombre de bons repas.

Territoires

Un des mérites du salon de l’agriculture est de faire découvrir ou redécouvrir, aux citadins les Régions et leur choix de vivre loin du béton et des soirées canapés + écrans. Combien de gamins y voient pour la première fois « en vrai » une vache, un mouton ? Les exposants gardent le sens de l’accueil - souvent perdu dans les entreprises - du sourire, de l’humour : « Je vois la vie en rose » « Couleur Manche à l’eau » et sur le stand de la Corrèze « Les fines bouches rient ». Nombreux sont les appels explicites à s’installer en Régions pour y trouver de l’espace à prix raisonnables, des appuis, un personnel motivé, désireux de vivre « au pays ». On découvre des exemples parfois surprenants tel que celui d’un paysagiste reconverti dans l’élevage d’escargots dans le Gard. Le travail a permis à des cadres d’apprécier la vie à la campagne et plus d’un songe à s’y installer en tant que consultant, artisan, hôtelier, commerçant… Il y a des vocations à susciter chez les jeunes gens pour revenir à la Nature. Tant d’agriculteurs sont proches de l’âge de la retraite.

Jean-Louis Wilmes

 

Les pavillons étrangers très fréquentés

En poursuivant notre visite, nous avons parcouru les allées des pavillons internationaux et d’outre-mer. De nombreuses nationalités et leurs spécialités étaient représentées. On y trouvait une délégation lybienne, preuve que ce pays revient progressivement à la normale. Parmi eux, celui d’Espagne Royale.

Andrei Orza nous présente une grande variété de produits provenant de différentes régions espagnoles. Du jambon de Guijuelo, en passant par Teruel, avec un arrêt stratégique dans la Ribera del Duero pour déguster l’un de ses vins, comme celui de la ville de Toro. Sans oublier le fromage Manchego, les boîtes de Conservas Ortiz ou la paella valencienne. En réalité, nous pourrions parfaitement découvrir les saveurs de toute l’Espagne grâce à la variété de ses produits, indique-t-il. Ces produits sont proposés dans la boutique d’Espagne Royale, dans le XIIIème. Une autre ouvrira prochainement à Saint Cloud.

L’aventure d’Andrei a commencé à Paris en 2019. Son idée est de mieux faire connaître le jambon ibérique et sa découpe dans des événements. Depuis, son activité de traiteur s’est notablemment élargie et les spécialités proposées à la dégustation reflètent le panorama de la gastronomie espagnole. Il travaille en rélation directe avec les entreprises, les ambassades et les ministères, dans toute la France.

L’événement le plus emblématique a été la célébration de la fête nationale espagnole qui s’est tenue au Château de la Muette, siège officiel de l’OCDE.

Le succès ne se dément pas, en raison de l’intérêt porté à l’atmosphère et à la qualité espagnoles… y compris la danse flamenco !

Mónica Delgado Manero