Le libre exercice d'une activité professionnelle est un principe de base de notre droit. Cependant, il peut être limité contractuellement, en particulier dans les emplois sensibles ou commerciaux. Les restrictions ont pour contrepartie une indemnisation pécuniaire. Et surtout elles doivent être raisonnablement bordées dans le temps et dans l’espace.
A cet égard, un arrêt récent de la cour de cassation (Chambre sociale 03/07/2019), semble minorer la portée de cette analyse habituelle en demandant aux juges du fond de vérifier la réalité de l'obstacle fait au libre exercice de sa profession pour le demandeur ou la demanderesse.
En l'occurrence une manager d'une boutique de luxe avait vu, par ricochets successifs liés à des mutations, sa clause de non-concurrence étendue à des zones mondiales très larges.
A la suite de sa démission et d’un désaccord avec son employeur quant au calcul de l’indemnité compensatrice de sa clause de non-concurrence, elle a attaqué en justice sur le chef d’une prétendue nullité de ladite clause.Les juges du fond accueillirent favorablement sa demande, relevant que les zones géographiques très étendues stipulées – Asie, Europe, Etats du Pacifique – représentaient une restriction excessive à la liberté du travail. Mais la Chambre sociale ne suit pas ce raisonnement. Elle estime que les juges du fond auraient dû vérifier si, « la salariée se trouvait (dès lors) dans l'impossibilité d'exercer une activité conforme à sa formation, à ses connaissances et à son expérience professionnelle ». Et les hauts magistrats de casser l’arrêt d’appel.Cette décision nous laisse dubitatifs. En tout cas, elle s’inscrit dans une longue série d’assouplissements accordés aux employeurs.
Vincent Gardy