En dépit de difficultés sociales et identitaires en 2017 dans le Rif, qui semblent s’être atténuées depuis, ainsi que de sa sensibilité aux aléas climatiques, le Maroc tire correctement son épingle du jeu, en développant les accords de libre-échange avec de nombreux partenaires – l’Union européenne ou le Moyen Orient principalement, et en développant son influence en Afrique subsaharienne.
Dans ces conditions, Coface, assureur-crédit spécialisé dans la couverture des risques à l’export, attribue la flatteuse note A4 à la fois au risque pays et à l’environnement des affaires de notre voisin d’outre-Méditerranée. C’est rarissime sur le continent africain. Bien sûr, le Maroc bénéficie de sa proximité avec le marché européen, et d’une stratégie de montée en gamme de sa production dans l’industrie, relève Coface. Mais le royaume chérifien a su également prospérer au sud, dans un continent en forte croissance. De plus, le pays s’avère stable politiquement, grâce à un roi davantage présent aux commandes qu’à ses débuts et en dépit d’une instabilité ministérielle fréquente… Cependant, l’agriculture, qui constitue encore une partie importante du PIB, subit les aléas du climat, quant aux céréales en particulier. La sécheresse pesa ainsi lourdement sur le PIB en 2016 (+1,2% seulement) et des pluies bienfaisantes le propulsèrent au contraire à un joli +4,3% en 2017.
Tout ne va pour le mieux pour autant. Le taux de pauvreté demeure significativement élevé, surtout dans certaines régions, de même que le taux de chômage.
La hausse du PIB agricole (+15,1%) a donc dopé le PIB global en 2017. Cependant, d’autres secteurs se sont aussi montrés dynamiques, à l’exemple des industries manufacturières et des services – touristiques en particulier, relèvent encore en substance les experts de Coface. En revanche, la construction reculait, à l’image du marché immobilier résidentiel.
Un régime pluvieux moins favorable, mais pas catastrophique, va aboutir en 2018 à une croissance vraisemblablement un peu moins tonique (2,5%/3%).
La diversification de l’économie chérifienne contribue à tempérer ces effets de balancier. De plus, la consommation reste tonique. Quant à la politique d’investissement, elle est expansive, selon le terme de Coface. On pense par exemple aux grands projets aéroportuaires de Tanger et de Nador. L’investissement public est complété par ceux du secteur privé, stimulés par une politique fiscale accommodante, comme on dit de nos jours. Les exportations sont également tirées à la hausse par des partenaires commerciaux eux-mêmes en bonne forme.
Des comptes publics contrôlés
Du côté des finances publiques, les experts de Coface sont plutôt positifs. La dette publique, légèrement haussière, devrait dépasser les 65 % du PIB à fin 2018, avec un solde public déficitaire en revanche en recul à 3,5 % du même PIB.Les dépenses publiques sont portées par les investissements des entreprises appartenant au secteur de l’Etat, ainsi que par celles de fonctionnement, tirées par les embauches dans l’Education nationale. Cependant, les puissances publiques s’endettent essentiellement sur le marché domestique, et à des conditions, pour le moment, avantageuses.Quant au commerce extérieur, c’est plutôt un point noir, à tout le moins gris, en particulier en raison de la hausse du prix des hydrocarbures, et malgré la poussée des exportations agroalimentaires, automobiles et même aéronautiques. Le phosphate saharien a également vu ses ventes augmenter.
Les comptes extérieurs sont surtout sauvés par l’augmentation des recettes touristiques, celle des transferts des expatriés et ainsi que par la hausse des IME. La flexibilisation du régime des changes, qui avait été un temps envisagée, et dont l’annonce avait créé quelques remous, a été repoussée.
Commerce extérieur : une part de marché tricolore en baisse
L'expansion économique du continent africain ainsi que les énormes ressources de son sous-sol attirent les convoitises. La Chine y est, en particulier, de plus en plus active. Dès lors, l'omniprésence de la France dans ses anciennes colonies, tant décriée naguère, décroît régulièrement, au profit d’autres nations européennes ou extra-européennes, dont la Chine précisément.Le Maroc ne fait pas exception à la règle. Ainsi, notre part de marché dans les importations du royaume chérifien est-elle certes toujours significative, mais en recul. Dans la décade 2006-2015, nos exportations ont progressé de 1,7 % par an en moyenne, contre 6,4 % pour l'ensemble des achats marocains, toujours en moyenne annuelle.
Aujourd’hui, nous sommes presque talonnés par la Chine (8,2 % de parts de marché en 2015, et troisième fournisseur). L’Espagne, proche voisin du Maroc, il est vrai, tend à nous damer le pion désormais, et est devenue le premier partenaire commercial (achats comme ventes) du pays de l’Atlas. Notre solde bilatéral est en général légèrement excédentaire (24,8 millions d’euros par exemple en 2016).Tout dépend beaucoup de nos exportations de céréales. Lorsque la sécheresse s’abat sur le Maroc, il s’approvisionne à l’extérieur pour cette denrée essentielle. Et ce fut le cas en 2016.Le premier poste de nos exportations est celui des équipements mécaniques, du matériel électrique et électronique (1 206 millions d’euros en 2016), devant les matériels de transport (731 millions en 2016), et les produits agricoles au sens large (548,9 millions en 2016). L’agrégat des autres produits industriels culminait à 1 502 millions d’euros il y a deux ans.De notre côté, nous importons d'abord des matériels de transport : automobile, en particulier, à hauteur de 1 358 millions d'euros en 2016, devant les produits agricoles (689 millions) puis les équipements mécaniques, les matériels électriques, électroniques et informatiques (566 millions d’euros). L’agrégat des « autres produits industriels » atteignait 308 millions d’euros, toujours en 2016, où nous avons vendu globalement pour 4 273 millions d’euros, et acheté pour 4 248 millions d’euros. Un commerce très équilibré en fin de compte.
La France toujours bien placée
Le stock d'IDE français au Maroc s’élevait, selon la Banque de France, à 9,3 milliards d'euros fin 2015, soit 57,4 % du stock total de nos investissements en Afrique du Nord, et 18,7 % de celui du continent africain. Et il est vrai que le Maroc est un des pays les plus attractifs dudit continent. Notre stock d’IDE était en 2015 d’abord fixé dans l’industrie (41,4 %), suivie de l’immobilier (29,5 %), des activités financières (8,6 %), enfin un secteur de l’énergie, de l’eau et de l’assainissement, loin devant l’hôtellerie (2 %). Quand on parle en industrie, il s’agit principalement du secteur agroalimentaire.En termes de flux, la France reste également un des acteurs majeurs en termes d’IDE au Maroc. Ainsi, toujours en 2015, malgré une forte baisse alors par rapport à 2014, les acteurs français avaient investi 5,2 milliard de MAD, juste derrière les Emirats Arabes Unis (6,3 milliards de MAD) et devant les Etats-Unis (3,6 milliards de MAD).
L’Espagne se montre également généralement très active.