Le Portugal ne fait pas forcément beaucoup parler de lui. Sa situation politique plutôt stable, la taille de sa population ou de son économie n’en font pas un acteur majeur dans l’UE. Pourtant, les touristes français s’y rendent en masse et nos IDE sur place se situent au deuxième rang avec 17,38 milliards d'euros, juste derrière ceux de l’Espagne. De quoi aviver notre intérêt à en savoir plus.
La population du Portugal est relativement stable depuis des décennies – environ 10 millions d’habitants. La saignée produite par une émigration massive, tout particulièrement en France où nous avons accueilli dans les années 1960-1970 un million de Lusitaniens, n’a pas été compensée par l’arrivée des rapatriés d’Angola, ni par un taux de natalité qui demeure désespérément bas. En revanche, le niveau de vie a considérablement augmenté, suite à l’intégration dans l’UE et aux aides subséquentes qui lui ont été versées. Aujourd’hui encore, le Portugal bénéficie largement du fonds de soutien européen.
La croissance du tourisme, mais aussi de l’industrie automobile, reposant en grande partie sur le partenariat avec Stellantis, l’attrait du pays pour les retraités européens aussi ont permis une certaine prospérité économique pour ceux qui sont restés au pays, même s’il demeure des poches de pauvreté, dans l’Alentejo par exemple. Le PIB par habitant est aujourd’hui évalué à 24 296 dollars. Evidemment, c’est moins qu’en France, en Allemagne ou au Royaume-Uni… mais ce n’est pas si mal. Le pouvoir d’achat des Portugais et donc appréciable.
Ce qui est assez remarquable, lorsqu’on se penche sur les principaux indicateurs économiques, relayés par exemple par Coface, c’est qu’actuellement ils sont plutôt meilleurs que la moyenne de ceux de l’UE, de la France en particulier. La croissance a même été assez forte en 2023 (environ 2,5 %), nettement au-dessus de la moyenne de l’UE, avec une prévision de 1,4 % en 2024, selon Coface. Les comptes publics sont surtout quasiment équilibrés. Le solde public est évalué en très léger déséquilibre en 2023, la même chose en 2024. Rappelons qu’en France, on a « fait » -5,5 % l’an dernier. Tout cela alors qu’au pays de Vasco de Gama, le « quoi qu’il en coûte » a été quasiment supprimé. Quant au fameux ratio dette publique/PIB, il est certes élevé (106,2 % en 2023), mais il devrait cette année reculer assez sensiblement à 103,1 %. C’est encore une fois mieux que nous.
Encore des faiblesses structurelles
Alors, tout va-t-il pour le mieux dans le meilleur des mondes au pays du nostalgique fado ? Pas tout à fait, prévient Coface. L’assureur-crédit français pointe à cet égard « des insuffisances croissantes en matière d’infrastructures », un secteur manufacturier à la valeur ajoutée faible ou moyenne, un système juridique lent et des banques grevées par des portefeuilles de créances à risques.
En revanche, Coface relevait en 2023 parmi les points positifs une gouvernance politique plutôt stable. Actuellement, c’est un peu moins bien, on le sait, mais il semble que le PSD et le PSP, adversaires pendant la campagne électorale, aient conclu a minima un pacte de non-agression, car le PSD et ses alliés ne veulent pas traiter avec Chega, parti qualifié d’extrême droite. Il y a fort à penser que la politique du PSD sera similaire à celle du PSP, ne serait-ce que parce que c’est la commission européenne qui est le chef d’orchestre dans l’UE et impose ses vues, surtout à un pays qui a besoin des fonds européens. A cet égard d’ailleurs, son taux d’absorption des dits fonds est supérieur à la moyenne. Car il faut savoir que le taux d’emploi n’est pas forcément très élevé dans tous les pays. Autre point positif rapporté par Coface, le faible coût de la main-d’oeuvre et la naissance d’une industrie manufacturière nouvelle, dans les produits alimentaires et électroniques. Enfin, alors que l’on parle à longueur de journée de transition énergétique, le potentiel de cet Etat de l’extrême-ouest européen en matière d’énergie renouvelable est significatif, tant en matière d’hydroélectricité que d’éolien ou de photovoltaïque.
Attractivité touristique et en matière d’investissement
Parmi les atouts du Portugal, il y a évidemment le tourisme, même s’il est dimensionné à une taille plus réduite que l’Espagne, par définition. Il a connu un rebond post-pandémie qui l’a porté au-dessus du niveau de 2019. Les dépenses des voyageurs français en 2023 ont du reste atteint un record à plus de 3,1 milliards d’euros, après un creux à 1,5 milliards en 2020 et un premier sommet à 2,5 milliards en 2019. Même si l’on considère l’effet de l’inflation (du reste en recul à 2,6 % en 2023, après 6,5 % en 2022 et peut-être 1,4 % en 2024), le saut est considérable. Lesquels éléments, combinés, mettent notre balance des services bilatérale en piteux état (-4,1 milliards d’euros).
Pour ce qui est des IDE, nos positions sont à l’inverse, très fortes. Nous détenons la deuxième position, avec donc 17,3 milliards d’euros de stock, faisant de nous le deuxième investisseur étranger derrière l’Espagne. Le service économique de notre ambassade à Lisbonne recense 1 200 filiales d’entreprises tricolores, opérant dans des secteurs variés, à commencer par l’automobile et l’aéronautique, mais aussi le tourisme bien entendu, les services au sens large, la logistique et d’autres secteurs industriels. Ces filiales emploient la bagatelle de 110 000 personnes et réaliseraient un CA annuel de plus de 17 milliards d’euros.