La conjoncture économique est incertaine. Les défaillances d’entreprises sont à la hausse. Les commandes sont plus difficiles à obtenir et l’on éprouve d’autant plus le besoin de sécuriser le poste-clients. Quel rôle pour l’assurance-crédit dans ce contexte ? Nous nous sommes entretenus avec Franck Lemoine, directeur commercial et marketing de Pouey International, afin qu’il nous éclaire sur ce point, ainsi que sur l’offre de son entreprise en la matière.
Conquérir : Quelle place convient-il d’accorder à l’assurance-crédit dans la sécurisation du posteclients ?
Franck Lemoine : C’est un dispositif qu’il faut prendre en considération car il est très pertinent. Il permet de se protéger du risque de non-paiement, de se couvrir en cas de défaillance d’un client dont l’impact peut être important, enfin de monitorer son poste-clients en fonction des résultats de l’analyse des risques effectuée par l’assureur-crédit. L’entreprise va ainsi pouvoir sécuriser, en règle générale, jusqu’à 80 % de son CA. Cela sauf en cas de risque systémique, comme ce fut le cas en 2009-2010…
Conquérir : ... cela représente un coût !
Franck Lemoine : Certes, il faut payer une prime d’assurance, mais la couverture peut éviter une perte de CA et de résultat dont les conséquences seraient très préjudiciables, a fortiori dans le cas assez fréquent où les marges sont faibles. C’est pourquoi environ 15 % des entreprises de plus de 10 salariés (le taux d’équipement augmente avec la taille des entreprises) sont aujourd’hui dotées de solutions d’assurance-crédit. Cette proportion pourrait augmenter alors que l’environnement économique est dégradé et que les dépôts de bilan sont à la hausse. Le METI (Mouvement des ETI) annonçait ainsi un CA en baisse de 10 % en 2024 pour cette catégorie d’entreprises. Cela, alors qu’une nouvelle concurrence chinoise apparaît depuis moins d’un an, à la recherche de nouveaux marchés hors USA…
Conquérir : ... tous les risques ne sont pas couverts !
Franck Lemoine : Effectivement. La couverture exclut d’emblée les risques relevant d’un litige non résolu, de la force majeure ou de la fraude. L’assureur-crédit est là avant tout pour couvrir l’insolvabilité. En règle générale, il se rémunère sur l’intégralité du poste-clients couvert d’une société, ce qui lui permet de moyenner ses risques. Cela étant, les acheteurs de leurs clients sont rangés en trois catégories : ceux qui sont garantis, ceux qui le sont partiellement et ceux qui sont refusés, car leur niveau de solvabilité est estimé trop faible. Dans ce cas, l’exclusion est réalisée à partir d’une grille de notation. L’encours maximum peut être également plafonné afin d’équilibrer les garanties vis-à-vis d’autres sociétés clientes de l’assurance-crédit. Quant à la question que l’on pourrait se poser sur l’attitude actuelle des assureurs-crédit, nous ne remarquons pas de frilosité particulière, en tout cas pour le moment. Les notations issues de l’analyse des comptes 2024, supposément moins bons qu’en 2023, pourraient évidemment quelque peu modifier la donne.
Conquérir : Comment se situe Pouey International, qui au départ est un spécialiste du recouvrement de créances, dans l’univers de l’assurance-crédit ?
Franck Lemoine : Notre société aux capitaux familiaux est plus que centenaire, vous le savez. Notre offre a évolué au fil du temps et s’est étoffée. Le recouvrement, ce que j’appellerais le curatif, représente encore 40 % de notre CA. Avec le temps, s’y est ajouté le renseignement commercial et financier, reposant sur les études ad hoc de solvabilité de tiers (fournisseurs ou clients). Notre expertise en la matière, basée sur des enquêtes commerciales approfondies permettant d’évaluer précisément la solvabilité d’une entité à l’instant T, nous a conduits à créer en 1997 une société d’assurance à même de proposer des solutions différentielles sur le marché de l’assurance-crédit…
Conquérir : ... de quoi s’agit-il ?
Franck Lemoine : Tout d’abord, nous pouvons intervenir en top up, à savoir en complétant la garantie sur un encours que ne souhaite pas accorder l’assureur-crédit au-delà d’une certaine somme, pour les raisons que j’ai indiquées précédemment. Ensuite, nous sommes à même de garantir un risque choisi par l’assuré dont le portefeuille est principalement constitué de clients ne causant aucune inquiétude. Il veut juste se protéger sur certains d’entre eux qui apparaissent éventuellement plus fragiles. Dans 80 % des cas, nous accordons ces garanties, qui peuvent aller jusqu’à 300 000 euros d’encours/acheteurs.
D’autre part, les caractéristiques de notre police sont différentes de celles de nos confrères « de premier rang ». En premier lieu, la prime perçue ne porte que sur le client ou les affaires considérées et non pas sur la totalité d’un poste-clients. Ensuite, nous intervenons très vite, après l’échéance. La société couverte doit nous faire part d’un retard de paiement sous 30 jours, sauf exception. Enfin, nous indemnisons notre client sur la base de 100 % du montant hors taxes de la créance dans la limite de la garantie accordée et sans quotité comme le pratique le métier.
Notre approche chirurgicale nous permet de compléter utilement un dispositif primaire, en offrant à l’entreprise des sécurités additionnelles ou alternatives sur ses marchés domestiques ou internationaux.