Au moment où le risque client est plus prégnant que jamais sans doute, et alors que la conjoncture économique impose de développer une action commerciale énergique, le rôle du credit manager est essentiel. Nous avons interrogé, comme chaque année, Nicolas Flouriou, président de l’AFDCC (Association Française des Credit managers et Conseils).
Conquérir : Les échéances approchent pour la facturation électronique. Où en sont les entreprises dans la préparation de son arrivée ?
Nicolas Flouriou : Les cigales de la facturation électronique sont nombreuses ! Beaucoup d’entreprises ne sont pas prêtes ! Et à partir de septembre 2026, toutes les entreprises – TPE/PME comme grands groupes – devront recevoir leurs factures via une plateforme agréée (ex PDP). Des tests ont déjà démarré cet été, avec des factures réelles émises entre les plateformes et PEPPOL, un annuaire déjà actif et plus de 16 000 entreprises inscrites.
On escompte une centaine de plateformes agréées (ex PDP) au final… pour 5 millions d’entreprises. On peut craindre un goulot d’étranglement pour les retardataires. Outre le choix de la plateforme, qui effectura les traitements, le chantier est vaste : adaptation des outils, récupération des statuts, refonte des processus internes, voire mise en place de nouveaux logiciels comptables, de facturation… Ce n’est pas une simple mise en conformité technique : c’est une transformation structurelle, qui impacte toute la chaîne Order-to-Cash. Cette réforme, c’est aussi une transformation profonde de la gestion client-fournisseur. Et donc un enjeu pour le Credit Manager.
Conquérir : Vous disiez que les mauvais payeurs ne disparaîtraient pas avec la mise en place de la facturation électronique. Qu’en est-il de la situation aujourd’hui ?
Nicolas Flouriou : Malheureusement, elle se dégrade assez notablement. L’augmentation des retards de paiement se poursuit, atteignant désormais 14 jours en moyenne et même 17 de la part des grandes entreprises. Il convient de rappeler que la loi LME avait permis un recul sensible de ce retard moyen à 11 jours en 2019. Puis, on avait atteint une sorte de plateau.
Pourquoi ? Certes, pour se faire de la trésorerie supplémentaire, qu’on en ait vraiment besoin ou pas, peut-être aussi en raison d’un sentiment dilué de sa responsabilité.
Cela étant, la conjoncture économique, qui se caractérise par une faible croissance, n’aide pas non plus à un comportement vertueux. Les chefs d’entreprise embauchent moins, investissent moins et dépensent moins ! Au final, moins de recettes et une insuffisance de cash parfois criante.
Et au final, le risque de faillites en cascade. Notez que, selon les enquêtes, une entreprise qui enregistre trop de règlements supérieurs à 90 jours, a 40 % de probabilité en plus que la moyenne de chuter elle-même.