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Commerce extérieur 2020 : alourdissement du déficit

Difficile de tirer des enseignements d’une année aussi perturbée que 2020, à tous points de vue, y compris de celui relatif au commerce extérieur de la France, d’autant que nous avons été fortement pénalisés par le ralentissement du transport aérien, qui a eu une répercussion immédiate sur nos ventes dans l’aéronautique.

Cependant, les comparaisons avec nos partenaires et concurrents de l’Union européenne, qui ont vécu des situations similaires, permettent de remarquer les différences de comportement de nos économies pendant cette crise.
Globalement, nos échanges extérieurs se sont contractés, comme ceux de la plupart des pays du monde. Cependant, nos exportations sont en recul plus net (-15,9 %) que nos importations (-13 %). Dans ces conditions, notre déficit FAB/FAB se dégrade à nouveau de 7,3 milliards d’euros à 65,2 milliards contre 57,9 en 2019. Un sommet depuis 2012, remarquent les experts de la statistique publique du département des Douanes et droits indirects du ministère des Finances.
Alors que l’on parle beaucoup de la nécessaire réindustrialisation de la France, après tant d’années d’abandon, notre solde manufacturier – négatif de 22,3 milliards d’euros –pèse lourd dans la balance. Si les ventes, comme les achats du reste, de produits pharmaceutiques demeurent dynamiques, les secteurs de l’automobile et de l’aéronautique nous apportent des déboires. Ponctuellement, nos importations de masques de protection (5,9 milliards d’euros) ont durement affecté nos comptes. Cependant, la baisse du prix moyen du pétrole en 2020, additionnée à la diminution de l’activité, ont fortement allégé notre fardeau énergétique (déficit de 25,7 milliards d’euros contre 44,8 milliards), tandis que notre excédent agricole reculait légèrement, de 0,4 à 1,4 milliard. In fine, nos importations FAB reviennent à 493 milliards d’euros, et nos exportations à 428,1 milliards.

UE et Asie pèsent lourd dans notre déficit

En incluant le matériel militaire et certaines autres données, le solde commercial CAF/FAB se monte à 82 milliards d’euros (en hausse de 4,7 milliards d’euros par rapport à 2019) en-dessous cependant du plus haut niveau historique atteint en 2011 (91,7 milliards). Mais attention, le solde énergétique était alors beaucoup plus élevé.
Géographiquement, d’où provient essentiellement ce déficit ? Sans surprise, de l’Asie (dégradation de 9,6 milliards dont 6,6 avec la Chine), alors que parallèlement, l’excédent avec les USA se réduit de 5,4 milliards, toujours par rapport à 2019. Tandis que le déficit – considérable – avec l’UE (à 27) demeure stable, à 45 milliards d’euros quand même – notre solde – limité, s’améliore avec des pays tiers autres que l’Amérique. Pour ce qui est du Royaume-Uni, notre solde positif se réduit… On verra qui souffre le plus du Brexit (9,9 milliards d’excédent quand même). Notons que notre déficit avec l’ensemble de l’Asie ressort à 43,5 milliards d’euros, dont 38,9 pour la seule Chine.
Partant du principe que tous les pays du monde ont peu ou prou été touchés par le ralentissement économique, il est intéressant de comparer les évolutions des uns et des autres. Force est de constater que les résultats de cette étude nous sont défavorables. Ainsi, la baisse des exportations de biens en volume (-15,4 %) est supérieure à celle de la demande mondiale adossée à la France, selon le département des Douanes et droits indirects. Dès lors, notre part de marché est en baisse, cela alors que le taux de change de l’euro est relativement stable.
Observons maintenant de plus près l’évolution de nos principaux partenaires de l’UE.
L’Allemagne a certes vu son solde commercial se dégrader quelque peu, mais son excédent est toujours notable (5,5 % du PIB contre 6,7 % en 2019), alors que notre déficit passe dans le même temps de 3,1 % du PIB à 3,6 %.
Quant à l’Espagne et à l’Italie, leur solde relativement au PIB s’améliore même (1,3 % en territoire négatif au lieu de 1,4 % outre Pyrénées et 3,8 % en positif outre Arno, au lieu de 3,1 %). C’est que nos exportations ont chuté plus lourdement que chez nos trois voisins immédiats, où le recul est d’environ 10 %, seulement.
On peut remarquer – ce qui traduit sans doute le maintien d’une plus grande vitalité économique sur son sol – que la diminution des importations allemandes ( -7,6 %) est deux fois moins élevée que chez ses principaux partenaires européens. Cela étant, quelle tendance pour nos zones d’exportation privilégiées ? Force est de constater que, sur le long terme (2000 à 2020), nos parts de marché en Asie (+6 points) progressent sensiblement, presque autant que celles de l’Allemagne ((+7 points). L’Espagne ((+3 points) et l’Italie (+2 points) sont un peu plus à la traîne. La pharmacie en forme Dans cet environnement de crise sanitaire, nulle surprise à remarquer l’augmentation de nos ventes de produits pharmaceutiques (+4,7 %), même si elle s’inscrit dans une tendance de long terme. Parmi nos meilleurs acheteurs, figurent les Etats-Unis, en dépit d’une légère baisse, mais aussi la Suisse, la Belgique et l’Italie. En revanche, nos livraisons aéronautiques et spatiales s’effondrent de 45,5 %, après il est vrai un record historique de ventes à 64 milliards d’euros en 2019. La fin 2020 s’est avérée cependant beaucoup plus positive à cet égard. Malgré, là encore, une reprise au deuxième semestre, nos ventes d’automobiles assemblées ont également chuté – de 18,7 %, à peu près autant en pourcentage que celles des produits métallurgiques (-18 %). Pour le reste, tout est en territoire négatif, y compris dans nos points forts. Ainsi, nos exportations de produits agroalimentaires ont-elles décru de 4,3 %. Les boissons ont été impactées par les taxations imposées par les USA, provoquant là-bas un recul de nos ventes de cognac, de champagne, voire de vin. Les parfums et cosmétiques – un autre de nos points forts – n’ont pas échappé à la tendance (-12,7 %), de même que les textiles et l’habillement (-10,6 %), ou encore les produits informatiques (-16,6 %). Remarquons que, du côté de nos importations, on retrouve – mis à part le domaine des produits énergétiques – une relative symétrie, puisque les achats aéronautiques baissent de 44 % et celui des automobiles de 14,3 %. En revanche, nos importations de produits agricoles poursuivent leur progression
(+2,5 %), impactés il est vrai par la hausse des cours des denrées. On l’a dit supra, nos achats de produits pharmaceutiques ont nettement progressé – de 10,4 %, pour des raisons que vous savez, tandis que l’importation de masques a boosté nos importations dans la filière des produits de l’industrie textile (+21,3 % !). Mais la performance sans doute la plus remarquable provient du secteur des bateaux (+46,2 %), aussi bien des paquebots, des bateaux citernes, que plus généralement ceux conçus pour le transport des marchandises comme celui des personnes.

Commerce extérieur : un plongeon inégal selon les secteurs  

 

Il nous a paru intéressant en cette rentrée de faire un point de la situation de notre commerce extérieur à mi-année. Naturellement, il est impacté par la crise du Covid-19. Mais, les chiffres transmis par les douanes traduisent des évolutions qui ne sont pas forcément linéaires, c’est-à-dire de baisse en termes de rubriques. De même, l’évolution de nos échanges avec les pays tiers est souvent contrastée. 

Quoi qu’il en soit, la France a connu une importante dégradation de son déficit commercial au premier semestre 2020 (34 milliards d’euros au lieu de 29 pendant la même période de 2019). Cette accentuation du déficit est le fait d’une baisse plus importante de nos exportations (-21,5 %) que de celle de nos importations -17,6 %). Nos ventes résistent mieux vers l’Union européenne (-17 %), grâce à un rebond dès le mois de mai, que vers les pays tiers (-28,6 %). La plupart des biens sont affectés par le repli des échanges. Les produits pharmaceutiques bénéficient cependant d’une hausse de 10,1 % des ventes, particulièrement remarquée au premier trimestre. Les produits agricoles (+5,1 %) se sont montrés également toniques, alors que les exportations agroalimentaires ne reculent que modérément (-4,9 %).

En revanche, les secteurs automobile et aéronautique s’effondrent littéralement, tant en importations qu’en exportations (respectivement -47,2 % et -38,2 % d'un semestre à l'autre).

 Il convient de resituer ces chiffres dans le cadre d'une prévision de baisse du commerce mondial de 10 % en 2020, selon l'OMC. Le nouveau ministre délégué au Commerce extérieur et à l’attractivité, Franck Riester, ne nie pas la difficulté du moment. Il rappelait cependant le 7 août dernier « les bonnes performances enregistrées en matière de commerce extérieur et d’attractivité depuis 2017 ». Il valorise ainsi l'importante progression de nos exportations de 2017 à 2019 (+17,6 milliards d'euros), la réduction de notre déficit pendant cette période (de 5,1 milliards d’euros), ainsi que la place de numéro un en Europe en matière de projets d’IDE.

Les réformes économiques et fiscales entreprises par les gouvernements de la présidence Macron sont, selon Franck Riester, à l'origine de cette performance légèrement améliorée, et peut-être de la croissance du nombre d’entreprises exportatrices, atteignant « son plus haut niveau depuis 19 ans », fin mars 2020 à 130 000, selon les données du ministère.

De nouvelles mesures ont été décidées le 25 août en Conseil des ministres, qui viennent s’ajouter au plan de relance spécifique déjà mis en place pour des secteurs majeurs comme l’aéronautique (15 milliards d’euros), l’automobile (8,5 milliards) et le tourisme (18 milliards).

Une belle consolation, selon la Banque de France, nos échanges de services demeurent légèrement excédentaires, malgré un repli sensible (+2,4 milliards d'euros contre 11,7 au premier semestre 2019).

Le déficit manufacturier double

Au deuxième trimestre proprement dit, nos exportations ont reculé de 28,9 %, après 7,3 % au premier trimestre. Quant à nos importations, elles ont suivi le même chemin, toutefois moins pentu (-20,7 %, après -6,4 %), le tout en données FAB. Le déficit de la période du 1er avril au 30 juin s’élève donc à -20,4 millions d’euros. Pour une fois, ce n’est pas le déficit énergétique (-3,9 milliards d’euros), qui a pesé le plus. En effet, la baisse des prix du pétrole conjuguée à de moindres besoins énergétiques en relation avec la crise, a réduit nos achats. En revanche, notre déficit manufacturier a doublé, à 18,8 milliards d’euros. Il est à noter – quelle tristesse –  le montant élevé des importations de masques de protection, qui creuse le déficit de 3,7 milliards d’euros !

Quant à nos ventes à l’extérieur, près de la moitié de leur baisse au deuxième trimestre provient des matériels de transport (-60 %), et encore davantage des équipements aéronautiques et spatiaux (-64,2 % au second trimestre après -26,2 % au premier).  Tout le reste recule, y compris les produits agricoles (-4,2 % après +4,8 % au premier trimestre), ou même les produits pharmaceutiques (-12 %, après +13,4 %). Mais ces secteurs résistent bien tout de même, à l'instar également du bois-papier-carton et des produits chimiques hors parfums. Car le luxe est également atteint.

Achat de masques de protection : l’explosion

L’évolution des importations est également contrastée. Bien entendu, là encore, l’aéronautique (-51 % par rapport au premier trimestre) et l’automobile (-44,6 %), tirent nos achats à la baisse. Le département des statistiques et des études du commerce extérieur relève un élément significatif, qui est un recul des importations de biens d’investissement beaucoup plus important que celui des biens de consommation. Par exemple, les produits des industries agroalimentaires (-6,7 %), reculent peu. On remarque même une hausse de certains postes, comme celui des produits pharmaceutiques (+1,1 %), ou encore des téléphones et ordinateurs.

Beaucoup plus importante est la hausse des achats de textile–habillement (+12,8 %) tirés par celle des masques (3,6 milliards d'euros pour le seul deuxième trimestre). Une veine pour la Chine ! Quant aux importations énergétiques, c'est par contre l'effondrement (-40,4 %), ce qui correspond malheureusement à l’anémie de notre économie.

Dans ce contexte, nos soldes par compartiments tendent pour la plupart à se dégrader. L'aéronautique devient ainsi à peine excédentaire (0,9 milliards d'euros, contre 5,2 au premier trimestre). Et cela n'est pas près de s'enrayer. Le solde agricole demeure également positif (0,8 milliard), de même que les parfums et cosmétiques (1,7 milliard) mais en net recul, la chimie ou les produits pharmaceutiques (0,4 milliard). L’agroalimentaire (0,7 milliards) tire aussi son épingle du jeu. L’énergie, avec un solde négatif de 5,6 milliards d’euros nous pénalise moins (-11 milliards en moyenne habituelle). Le textile–habillement–cuir nous fait plonger de 5,6 milliards d'euros. Quant aux véhicules et équipements, régulièrement déficitaires depuis plusieurs années, car nous produisons de moins en moins en France, il participe au déficit du deuxième trimestre pour 3,1 milliards d’euros.

Une meilleure résistance des exportations vers l’UE

Nos exportations reculent partout mais dans une moindre mesure vers l’UE hors UK (-26,8 %) toujours par rapport au premier trimestre, ce qui fait environ 30 % de moins par rapport à un trimestre « normal ». Vers l’Europe hors UE, on est à -60 % environ, toujours par rapport à la « norme », -40 % pour l’Amérique, -65 % pour l’Asie, et -30 % « seulement » pour l’Afrique.

Les importations d’Asie en forme

Du côté des importations, l'Asie résiste très bien par rapport à la moyenne trimestrielle habituelle (-4 %). La chute est plus notable pour le reste des zones géographiques, dont l’UE (-25 % environ), l’Europe hors UE (-40 %), l'Amérique (-30 % environ). In fine, notre solde s’aggrave très notablement au deuxième trimestre vis-à-vis de l’Asie (+55 % en moyenne trimestrielle à -13,5 milliards). Par rapport à l’UE, on reste dans les eaux habituelles, à -10,5 milliards, ce qui est cependant beaucoup en pourcentage, puisque les valeurs globales ont notablement diminué.

Nos seuls excédents – limités – par zones géographiques, correspondent au Proche/Moyen-Orient, à l’Afrique et à l’Europe hors UE.

Une analyse plus fine pays par pays permet d’observer – toujours au troisième trimestre, une dégradation de notre balance vis-à-vis de l’Espagne (-1 milliard d’euros mais aussi du Royaume-Uni (-1,7 milliard), Singapour (-1 milliard) et surtout bien sûr, la Chine (-3,1 milliards) ou encore la Suisse (-1,1 milliard).  Heureusement, cela va mieux avec les États-Unis, vis-à-vis desquels notre solde commercial s’améliore de 0,8 milliard d’euros. Il faut bien se consoler !

Pour finir et sur douze mois glissants (selon les données de la DGDDI comptabilisant y compris le matériel militaire), nos exportations atteignaient 455,5 milliards d’euros FAB (-10,4 %), alors que nos importations se repliaient de 8,5 % à 518,4 milliards. Ce qui fait ressortir un déficit sur cette même période de 68 milliards d’euros. Voilà qui nous ramène à peu près pour le moment au niveau de 2018, qui n’était pas terrible…  Car on observe que notre déficit, déjà élevé, pâtit de la crise, ce qui n'aurait pas forcément lieu d'être, et alors même que notre déficit énergétique se réduit considérablement. Cela démontre à l'envi, du point de vue des échanges de biens, notre vulnérabilité, liée à la disparition de l’industrie en France. Dès que l’aéronautique « s’en va », la misère apparaît dans toute sa splendeur. Et les belles incantations (« on va produire en France ») ne suffisent pas.

 

Chine : une relative mobilité dans un monde vacillant

Le grand malheur planétaire de 2020 est venu de Chine. C’est un fait. Et pourtant, c’est là que l’économie s’est rétablie le plus vite puisque son PIB aurait crû de 2,4 % l’an dernier. Le poids relatif de l’Empire du Milieu dans le PIB mondial a donc augmenté. En ces temps encore difficiles, il faut cependant préparer l’avenir et songer aux opportunités qu’il peut présenter. D’autant que l’accord récemment conclu avec l’Union européenne semble en mesure d’ouvrir quelques portes supplémentaires.

Nous ne disposons pas encore de données consolidées définitives sur 2020, et au demeurant, elles ne seraient pas représentatives des tendances de fond. Notre analyse sera donc principalement fondée sur les chiffres 2019, à la fois en termes d’investissements entrants et sortants en Chine, du commerce extérieur de ce pays et de la présence française dans ces deux aspects.

Il convient cependant de dire que la différence entre les chiffres chinois et non-chinois recèle des différences considérables, en grande partie liées aux plateformes de réexportation comme, par exemple, Hong Kong. Les marchandises qui y transitent et qui sont destinées à la France, sont identifiées la plupart du temps par les autorités de Pékin comme exportées à Hong Kong.

Nous nous servirons donc dans la plupart des cas des données fournies par nos services (Douanes, Trésor…).  Pour ce qui est donc des échanges de biens entre la France et la Chine entre 2010 et 2019, ils ont notablement crû, dans les deux sens, proportionnellement davantage en notre faveur. Mais pas en valeur absolue (environ 53 milliards d’euros d’achats pour nous en 2019 contre 36 en 2010), alors que nous vendions pour respectivement 21 et 12 milliards d’euros ces mêmes années. D’où un déficit qui a grimpé en neuf ans de 26,5 à 31,6 milliards d’euros. Selon les calculs du SER de Pékin, notre part de marché globale est relativement faible – mais sur de gros volumes il est vrai, à 1,5 %, alors que l’Allemagne par exemple, se situe autour de 5 %.

Cependant, nous sommes beaucoup plus forts dans certains domaines. Il en est ainsi de l’aérospatial (32,7%), mais aussi dans une moindre mesure, de la pharmacie et de la chimie (3,8 %). L’automobile se situe à 1,1 % (30 % pour l’Allemagne, ce qui explique nos divergences d’opinion sur certains sujets !).

Voyons maintenant les chiffres des échanges franco-chinois en valeurs absolues, et par grands secteurs. Cela en 2019. Numéro 1 des ventes, l’aéronautique et le spatial (7,4 milliards d’euros), numéro 2 l’agroalimentaire (2,7 milliards) tout juste devant les produits chimiques, les parfums et les cosmétiques (2,6 milliards). Les produits pharmaceutiques représentent 1,4 milliard d’euros en valeur, loin devant l’automobile (0,3 milliard).

A l’importation, sans surprise, les produits informatiques, électroniques et optiques font un carton (14,7 milliards d’euros et 28 % du total). Le textile, l’habillement, le cuir et les chaussures (9,9 milliards d’euros), constituent également une grosse part de nos achats  (18,7 %). Les équipements électriques et ménagers (6,4 milliards) ou encore les machines industrielles et agricoles (4,3 milliards d’euros) représentent aussi des sommes significatives. On peut du reste relever qu’on pourrait faire mieux en matière de machines industrielles et agricoles si l’on fabriquait davantage en Europe, et particulièrement en France.

Examinons maintenant le commerce extérieur chinois dans son universalité. Notons d’abord qu’en 2019, il avait réussi à progresser encore d’un petit 0,3 % certes, mais dans un contexte de recul de 3 % en volumes des échanges mondiaux. Du coup, à la faveur également d’une diminution de ses achats à l’extérieur, l’Empire du Milieu avait dégagé un excédent en hausse sensible, à 429 milliards d’USD au lieu de 382 en 2018. Son excédent avec l’UE avait ainsi grimpé de 137 à 151 milliards d’USD, et celui avec l’Asean de 56 à 73. En revanche, la guerre commerciale avec les Etats-Unis avait pesé sur son surplus vis-à-vis de ce dernier pays, quoique de manière modérée finalement (295 milliards d’USD en 2019 au lieu de 324 en 2018). L’arrivée d’un nouveau président aux USA ne devrait pas fondamentalement changer la donne des droits de douane durablement plus élevés. D’autant que le déficit commercial vis-à-vis de la Chine s’est aggravé en 2020.

Nos vins à la peine

Des exportations chinoises donc en légère hausse en 2019, mais que vendent donc les héritiers de la Cité interdite ? D’abord des biens d’équipement. C’est à rappeler et à souligner. Malgré un léger recul en 2019, ils atteignent toujours près de la moitié du total avec 176,9 milliards d’USD. Notons que les exportations de téléphone ont cependant baissé assez notablement de 6,8 % à 224,1 milliards d’USD.

L’augmentation de l’excédent commercial de l’Empire du Milieu a eu pour principale cause la baisse de 1,9 % de ses importations. C’est le cas de celles des semi-conducteurs
(-3,1 %) ou encore des produits pharmaceutiques, chimiques, des parfums et des cosmétiques (-3,2 %).

En revanche, les achats de produits agroalimentaires ont été dynamiques (+7,9 % à 161 milliards d’USD) en provenance de l’Asean (23,5), de l’UE (18,1), ou encore de la Nouvelle-Zélande (+16 % à 10,9 milliards d’USD) et de l’Argentine (+200 % à 6,6 milliards). Bien entendu, les achats en provenance des USA – dans ce secteur aussi, ont notablement diminué de 14,7 % à 14,7 milliards d’USD.

Si les importations de viande ont été très toniques (+7 %), avec une belle progression de l’UE à 4,5 milliards d’USD – l’Espagne se taillant la part du lion – l’Argentine remonte très haut.

En revanche, les achats de vins ont diminué de 14,4 % à 2,4 milliards d’USD. Dans ce contexte, la France perd sa place de premier fournisseur au profit de l’Australie, qui bénéficie d’une taxation zéro à l’entrée de ses produits dans le cadre de l’accord de libre-échange signé avec le pays des kangourous.

Heureusement, les achats de spiritueux ont été plus dynamiques (+13,7 % à 1,6 milliard d’USD) et là nous demeurons n° 1 (1,1 milliard d’USD), nettement devant le Royaume-Uni. Quant aux importations chinoises d’automobiles, elles se sont nettement tassées
(-7,9 % à 78,9 milliards d’USD), principalement en raison d’une contraction de la demande intérieure, selon le service économique de Pékin de notre ambassade en Chine.

Pays par pays, les Etats-Unis sont les plus touchés (-16 %), alors que l’Allemagne (-3,7 % à 23,4 milliards d’USD) demeure largement en tête des importations, devant le Japon (19,8 milliards d’USD). La France, avec 6,4 % à 0,9 milliard d’USD, demeure un intervenant relativement marginal pays par pays. Ce qui n’est pas le cas de l’aéronautique (8,9 milliards d’USD de ventes sur 27,3 milliards d’USD d’achats chinois). Nous y avons même résisté (-13 %, alors que les achats chinois dans ce secteur reculaient de 27,3 %). Les Etats-Unis ont subi une baisse de 43 ,1 % à 11,4 milliards d’USD, demeurant toutefois au-dessus de notre part de marché.

Globalement, les importations chinoises en provenance des USA ont dégringolé de 20,4 % alors que leurs exportations vers le pays de l’oncle Sam baissaient « seulement » de 12,5 %.

Investissements chinois dans le monde : perte de vitesse

La Commission européenne s’est réjouie de ce qu’elle considère comme un excellent accord, celui conclu avec la Chine fin 2020, en particulier en matière d’investissements de part et d’autre. Les commentateurs vantent les mérites de cette signature, survenue juste au moment du Brexit final. Du côté qui nous intéresse le plus, à savoir les possibilités d’investir pour nous dans l’Empire du Milieu, en gardant la maîtrise des opérations, sans avoir un mentor chinois, et sans risquer de « perdre » son savoir-faire, nous nous sommes entretenus avec des personnes qualifiées, connaissant bien la Chine. L’idée est de savoir ce qui va changer, officiellement et dans les faits.

Il est évident que nos « partenaires » vont aussi obtenir des améliorations de leur situation pour de futurs investissements en France et dans le reste de l’UE. Les négociateurs de l’UE ont donc mis en exergue un supposé succès. C’est à voir car leurs homologues chinois avaient certainement en ligne de mire la nécessité d’avoir la possibilité d’investir davantage sur notre continent. C’est que les investissements chinois dans le monde « sont en perte de vitesse depuis deux ans », souligne le service économique de notre ambassade de Pékin.

Après l’extraordinaire percée survenue dès le début des années 2000, on a constaté effectivement un recul – très marqué – des IDE de 60 milliards d’USD, entre 2016 et 2019. Le flux annuel est donc passé de 196 milliards d’USD à 136 ! En parallèle, ces IDE se sont recentrées vers l’Asean, et ce qu’il est convenu de nommer « les pays de la Route de la soie ». Les experts de notre ambassade estiment que cette tendance de fond devrait se poursuivre à l’avenir, au-delà de 2020, année très particulière, qui devrait avoir été marquée par une baisse de 40 % des flux globaux par rapport à 2019, tandis que ceux de la Chine demeuraient au contraire assez stables. Si l’on établit le palmarès des récipiendaires d’IDE chinois, les flux cumulés de 2005 à 2019 mettaient en tête l’UE à 28 avec 14,4 %, dont 4,2 % pour le Royaume-Uni et 1,4 % pour la France. L’Asean se trouve à 12 % et les USA à 8,7 %. Notons aussi la bonne position de l’Australie (5,7 %), ou encore du Brésil (3,4 %).

Ces investissements dans l’UE constituent essentiellement des acquisitions. La part provenant d’entreprises contrôlées par l’Etat est en nette baisse, pour trois raisons, selon notre ambassade : « des législations plus défensives en Europe, un contrôle renforcé des capitaux sortants, enfin une plus grande capacité des entreprises privées à investir à l’étranger ». Alors, sectoriellement, où l’appétence des Chinois se manifeste-t-elle le plus ? C’est assez varié: TIC, transports et infrastructures, énergie…

La France figure au 4e rang des destinataires d’IDE du pays de la Grande muraille dans « l’UE à 28 » (8,1 %), derrière le Royaume-Uni (28,3 %), l’Allemagne (12,7 %) et l’Italie (8,9 %). La Commission avait adopté en 2019 un Règlement permettant d’émettre des avis contraignants en cas d’IDE susceptibles de menacer la sécurité ou d’ordre public d’un Etat membre. Selon la Direction générale du Trésor, les contrôles de la France figurent parmi les plus stricts de l’UE.

Parmi les investissements remarquables effectués en France depuis 2010, signalons le rachat du producteur de cartes à puce Liuxens, la prise de participation majoritaire d’une société chinoise dans la marque de vêtements de luxe SMCP (Sandro, De Fursac…), ou encore le groupe Louvre Hôtels, dans un tout autre domaine.

Notons la chute nette – par ailleurs – des IDE de l’Empire du Milieu en Afrique, où les interventions chinoises sont diversement perçues, dirait-on en termes diplomatiques.


UE-Chine : un accord salué par la Commission

La Commission européenne annonçait fin décembre – au moment du Brexit définitif, un accord de principe sur les investissements entre l’Union européenne à 27 et la Chine. Un accord définitif devrait survenir dans un délai de deux ans.

L’idée de base du protocole convenu est de faciliter et de sécuriser les investissements des pays membres de l’UE dans le pays de la Grande muraille, sachant que les enjeux sont importants puisque les flux cumulés de l’ensemble de l’UE là-bas sont de 140 milliards d’euros (120 milliards d’euros dans l’autre sens). Si, de l’avis général, les contraintes pesant sur les investissements chinois en Europe sont limitées, ce n’est pas le cas de celles qui visent nos propres IDE : secteurs fermés, parfois ouverts mais avec obligation de transfert de technologie, de partenaires locaux majoritaires…  Les négociations UE-Chine duraient depuis huit ans. Notez cette longue période de discussions, alors qu’on nous a rebattu les oreilles sur le temps qu’il a fallu pour signer un accord de départ, puis un nouveau cadre commercial, avec le Royaume-Uni : trois ans « seulement » en fait.

La Commission européenne vante donc un excellent accord avec la Chine – qui pourrait être finalisé en 2022. Le cadre portera sur la protection des investissements et du règlement des différends qui pourraient survenir lors de son application. Selon l’UE, « la Chine a pris des engagements importants dans le secteur manufacturier », qui représente plus de 50 % des IDE de l’UE (dont 28 % pour le secteur automobile et 22 % pour les matériaux de base). On pense, en particulier, à la production de véhicules électriques, de produits chimiques, d’équipements de télécommunications et d’équipements médicaux.

Des engagements ont également été pris dans les services : cloud, finances, services de santé privés, environnement…  A ce propos, la Chine « a accepté […] de mettre en œuvre de manière effective l’Accord de Paris sur le changement climatique ainsi que les conventions de l’OIT qu’elle a ratifiées ». Merveilleux !

Le futur accord UE-Chine remplacera-t-il à terme tous les accords bilatéraux existants. De nombreux observateurs se montrent dubitatifs. Vu la taille du gâteau, les Etats européens se départiront-ils vraiment de leurs ambitions purement nationales ? L’Empire du Milieu jouera-t-il vraiment le jeu ? La commission d’arbitrage des conflits est-elle convenablement dimensionnée ? La concurrence sera-t-elle vraiment plus loyale ?

L’avenir nous le dira. On peut quand même sans trop de risques penser qu’une amélioration se profile pour nos investisseurs, mais il nous faudra certainement rester prudents.

Exportations 2019 : fournitures militaires, aéronautiques et pharmaceutiques à la hausse

Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d'Etat au Commerce extérieur, peut se réjouir d'avoir vu le solde de nos échanges internationaux réduit en 2019, à la faveur d'une croissance plus forte de nos exportations (+3,3 %) que celle de nos importations (2,2 %). Comme chaque année, nous essayons de tirer les principaux enseignements des chiffres des Douanes.

Le déficit a été réduit de près de 4 milliards d'euros en 2019, à -58,9 milliards d'euros, au lieu de -62,8 milliards en 2018. Evidemment, nous restons largement dans le rouge, où nous demeurons cantonnés depuis près de vingt ans, avec une nette dégradation dans les années 2010.

Cependant, on remarquera que, cette fois-ci, la diminution des prix du pétrole ne participe que pour 0,8 milliard à l’amélioration constatée. Ainsi, notre solde manufacturier, qui se creusait régulièrement ces dernières années, s’est réduit de 1,2 milliard en 2019, principalement grâce à la vigueur de nos ventes de produits aéronautiques, pharmaceutiques et de parfums, alors que nous achetons davantage d’automobiles – conséquence du départ de nos productions à l’étranger – ce qui est regrettable, et aussi de machines.

Quant à nos fournitures militaires, nous atteignons un sommet dans le solde positif (5 milliards).

Nous avons donc exporté pour 508 milliards d’euros de biens en 2019, et en avons importé pour 566,9 milliards. Si l’on regarde les zones géographiques, hors la réduction du déficit énergétique (44,8 milliards – tout de même – contre 45,4 en 2018), l’amélioration est essentiellement portée par nos échanges avec l’UE (-32,5 milliards au lieu de -35,1 l’année précédente). Notre déficit se creuse en revanche de nouveau avec l'Asie, de 3,7 milliards, atteignant -35,7 milliards. L'Amérique – et particulièrement les Etats-Unis est, elle, très réceptive à nos produits, avec un excédent en hausse nette, à +6,9 milliards d'euros. Nous enregistrons, a contrario, un déficit de 7 milliards vis-à-vis de l'Europe hors UE.

Nos échanges avec l'Afrique sont quasi stables et à peu près à l'équilibre. Si l'on zoome sur quatre de nos principaux partenaires, on remarque un excédent de 2,7 milliards d'euros vis-à-vis des Etats-Unis, dans un contexte d'échanges sensiblement à la hausse, avec 42,1 milliards d’exportations et 39,4 d’importations.

Ce volume global est relativement comparable à celui réalisé avec la Chine, sauf que le résultat est? dans ce dernier cas de - 32,9 milliards dans ce cas. Très bel excédent par contraste avec le Royaume-Uni, à plus de 12,5 milliards (33,7 de ventes, 21,2 d’achats). On ne sait pas qui aurait le plus à perdre en cas de « no deal » in fine. Pour ce qui est de l'Allemagne, nos échanges avec nos voisins d'outre-Rhin se tassent légèrement, tandis que notre déficit - 14,9 milliards d'euros, s’accroît un peu.

Agroalimentaire, aéronautique et pharmacie en forme

Les évolutions, cette fois par typologies, sont beaucoup plus contrastées d'une année sur l'autre. Des progressions notables sont ainsi enregistrées par l'aéronautique, la pharmacie et l'agroalimentaire. Les livraisons aéronautiques et spatiales ont ainsi progressé de 11,6 % à 64,2 milliards en 2018, cela alors que nous étions déjà précédemment à des seuils très élevés. Cette hausse est portée par les avions assemblés, comme par les moteurs ou les parties d’aéroplane. Les ventes de produits pharmaceutiques bondissent également, à 33,6 milliards (+10,4 %), grâce, en particulier, à une nette progression des importations des USA.

D’autres secteurs ne déméritent pas – loin de là. C’est le cas du textile et de l’habillement (+8,5 %), des parfums et des cosmétiques (+8,8 %), des boissons (+5 %), des produits agricoles (+5,4 %) et, dans une moindre mesure, de l’agroalimentaire (+2,4 %).

En revanche, les exportations de produits automobiles s’effritent encore de 1,6 %, alors que nous produisons de moins en moins en France. Les ventes de navires et de bateaux reculent également de 8 % après, il est vrai, une année 2018 record.

Importations : dynamisme des produits manufacturés

Du côté des importations, nos achats de produits manufacturés demeurent soutenus (+3,1 %), au-delà de la croissance de la demande intérieure globale (+1,4 %). Les achats de produits aéronautiques (+10,2 %) mais aussi de produits pharmaceutiques (+5,6 %), impactent fortement notre demande.

Sans surprise, les importations d’automobiles, également pour les raisons évoquées supra, poursuivent sur leur lancée précédente (+3,8 % après +2,7 % en 2018). Les véhicules (+4,8 %) tirent l’ensemble.

On l’a vu plus haut, nos achats de machines demeurent orientés à la hausse (+4,7 %), ce qui traduit en creux le dynamisme de nos investissements, et témoigne d’indicateurs avancés favorables pour notre économie.

L’investissement est, en effet, demeuré très soutenu en 2019 (+4,7 %, après +2,8 % déjà en 2018), cela étant en grande partie le fait de fournisseurs étrangers. Ces derniers contribuent davantage que les entreprises tricolores à pourvoir à la demande interne.

On peut noter aussi que nos achats de produits agroalimentaires atteignent un nouveau record à 42,1 milliards d'euros. Voilà un point moins positif à nos yeux.

Parmi les autres évolutions remarquables, notons la progression beaucoup plus rapide des achats de biens de consommation à l’extérieur que celle de la consommation finale des ménages (+4 % au lieu de 1,2 %).

Une part de marché mondial stable

En 2019, nos exportations de biens (+1,4 %), se sont situées très près de l’évolution de la demande mondiale (+1,5 %), dans un contexte de très grande stabilité de l’euro. Nos parts de marché restent donc globalement étales. Si la tendance de la France comme des Etats-membres de l’UE est à se tourner davantage vers des zones hors de l’UE, on se satisfera tout de même de l’amélioration globale de notre commerce extérieur.

Royaume-Uni : toujours proche malgré son départ de l’UE

Le Royaume-Uni est un de nos partenaires essentiels, ne serait-ce que parce qu'il nous rapporte notre plus gros excédent commercial, dans un océan de déficits. Tout ce qui s'y passe est donc très important pour la France. La dernière phase de son départ de l'Union européenne mérite dès lors qu’on prenne le temps des possibilités de commerce et d’investissement que la fière Albion nous offre, à l’aune ou en dépit de changements réglementaires ou administratifs.

Le Royaume-Uni a connu en 2020 une chute spectaculaire de son PIB, de l'ordre de 11 % après plusieurs années où sa croissance a tendu à se rapprocher à la baisse de la moyenne – relativement faible – des pays de l'Ouest européen. Ce ralentissement est sans doute dû en partie aux incertitudes concernant le Brexit. En 2019, cette croissance fut d’un peu plus de 1 %. L’inflation a alors également ralenti, à 1,8 %, alors qu’elle était plus élevée auparavant – près de 3 % en 2017 par exemple.

Face à l’épidémie de Covid, le Royaume-Uni a pris des mesures similaires aux nôtres, quoique probablement plus orientées vers les entreprises de ce point de vue. On pense au report d’impôts des indépendants, voire à la suppression de l’IS dans certains secteurs particulièrement éprouvés, à l’image du commerce de détail hors alimentaire, de l’hôtellerie ou encore des loisirs. Des garanties publiques d’un montant élevé ont été mises en place sur les prêts bancaires. Des budgets très importants ont été également instaurés, pour faire face cette fois à l'urgence sociale, avec des dispositifs généreux de chômage partiel, mais aussi d'aide aux indépendants.

Toutes ces dépenses exceptionnelles cumulées ont évidemment fait exploser les déficits, d'autant que la partie recettes a fortement baissé de son côté. Le solde public 2020 était prévu par les experts de Coface à -17,2 % en 2020 contre -2,6 % en 2019.  Quant au ratio dette publique sur PIB, il aura probablement dépassé la parité à 105 % environ, toujours selon Coface. Notons que nous avons fait pire en la matière !

Du côté des échanges commerciaux, ils sont traditionnellement lourdement déficitaires pour nos voisins. 2020 n'aura pas dérogé à la norme. Signalons qu’en 2019 le déficit de la balance des biens ressortait à 5,9 %, sans que le non moins traditionnel excédent de celle des services (4,8 %) parvienne à le compenser.

Fort heureusement pour lui, le Royaume-Uni conserve une place fondamentale dans le système financier mondial et arrive aussi à financer son déficit courant en engrangeant de nombreux investissements étrangers.

Alors, quels sont les points forts du Royaume-Uni ?  Coface relève en premier lieu sa production d’hydrocarbures, qui lui assure les trois quarts de ses besoins énergétiques. L’excellence de ses services financiers, ainsi qu’un régime fiscal compétitif, sont également des atouts significatifs. Et puis, on doit mentionner trois secteurs industriels de pointe : l’aéronautique, l’automobile et la pharmacie. Du côté négatif, Coface relève des dettes publiques et des ménages élevées (120 % du revenu disponible), une faible productivité ainsi, entre autres, que de fortes disparités régionales, particulièrement en matière d'infrastructures de transport et d'énergie. Autrement dit, Londres et le sud-est de l'Angleterre sont mieux lotis que le reste du royaume.

Echanges commerciaux : la France bien placée

Le Royaume-Uni connaissait, comme d’habitude, un très gros déficit commercial en 2019, qui atteignait 165 955 millions d’USD, selon la Banque mondiale, tandis que les excédents de sa balance de service culminaient à 132 000 millions d’euros environ. Les Etats-Unis sont de loin son principal client (15,7 % du total des exportations en 2019), devant l’Allemagne (9,9 %), la France (6,5 %) tout juste devant les Pays-Bas (6,5 %) et la Chine (6,4 %).

Du côté des importations – attention au pourcentage car ils sont en fonction de montants plus élevés d’un tiers environ, venait en premier lieu l’Allemagne (12,4 %) devant les USA (9,7 %), talonnés par la Chine (9,5 %). En quatrième position, on trouve les Pays-Bas (7,8 %), devant la France (5,6 %).


Brexit : des opportunités à travers de nouveaux cadres

Thierry Drilhon, président de la Chambre de commerce franco-britannique, est particulièrement bien placé pour nous donner un avis circonstancié sur l’évolution future des échanges trans-Manche, et sur les contraintes imposées par le Brexit à partir du 1er janvier. Même si la Chambre qu’il préside regroupe tant des entreprises françaises que britanniques, il s’exprime plus particulièrement dans nos colonnes du point de vue de l’intérêt des structures tricolores.

Conquérir : Peut-être tout d’abord quelques mots sur la Chambre de commerce franco-britannique et sur vous-même ?

Thierry Drilhon : Volontiers. Notre organisation compte environ 2 000 entreprises dans son écosystème. 60 % sont françaises, 40 % britanniques. Si l’on examine la stratification par taille cette fois, 30 % sont des grandes entreprises, 40 % des ETI et 30 % des PME-PMI.

Nous tenons particulièrement à accompagner les PME-PMI, car ce sont elles, dans cette période d’incertitude, qui ont le niveau le plus élevé d’exposition au risque.

J’ai pris la présidence de la Chambre en 2018. Je souhaitais faire bénéficier les adhérents de mon expérience du monde anglo-saxon, acquise à travers mes expériences de directeur général de Microsoft France et vice-Président monde de Cisco entre autres.

Conquérir : Quid de l’avenir après ces très longues négociations sur la sortie du Royaume-Uni de l’UE ?

Thierry Drilhon : Je souhaite d’abord dire que les britanniques se sont exprimés démocratiquement pour une sortie de l’UE, et qu’il convient d’en prendre acte. C’est vrai que les discussions ont été longues, mais il n’y a rien de pire, quel que soit leur résultat, que l’attente et l’incertitude qui s’ensuit. Désormais, nous y voyons un peu plus clair. Cependant, au-delà du cadre général de nos futurs échanges qui vient d’être tracé, il va falloir maintenant rentrer dans le détail, en particulier celui de 682 traités bilatéraux ou multilatéraux qui devront être revus. Les accords qui en résulteront auront des conséquences sur les échanges sectoriels concernés.

Conquérir : Des oiseaux de mauvais augure prédisent de longue date l’apocalypse…

Thierry Drilhon : …c’est exact. La période post-référendum a occasionné la diffusion de nombreuses fausses nouvelles comme le chaos sur le Channel, l’arrêt de la circulation des personnes et des marchandises…  Or, pendant que les discussions UE–RU s’éternisaient, tant les autorités administratives que les entreprises des deux côtés de la Manche se sont activées de manière, précisément, à préparer le terrain pour éviter ces écueils.

Même les PME–PMI se sont attelées à l’organisation de leur chaîne logistique, d’approvisionnement… post-Brexit. Quant à la partie douanière et taxes, les autorités françaises concernées ont mis en œuvre les bases d’une frontière intelligente. De son côté, la société qui gère le tunnel sous la Manche a mis 47 millions d’euros sur la table pour rendre à l’avenir le trafic de plus en plus fluide, en dépit des contraintes administratives supplémentaires qui s’imposeront. Les efforts réalisés par les gouvernements des deux côtés du Channel font, par exemple, que le processus douanier est prêt depuis deux ans.

 Conquérir : Le départ du Royaume-Uni va-t-il affaiblir notre relation économique et commerciale avec lui ?

Thierry Drilhon : Je pense qu’il faut distinguer le court-moyen terme d’une part, le long terme d’autre part. A court terme, il faut s’attendre sans doute à une réduction de notre relation, à travers des réajustements d’exportations des acteurs économiques. Mais la forte relation entre les deux pays perdurera et les fondamentaux sont là. Les transactions économiques entre la France et le Royaume-Uni représentent actuellement 107 millions d'euros par an. Notre coopération est particulièrement importante dans le domaine de l'aviation et de la défense. Tout cela ne s'effacera pas d'un trait de plume !

C'est vrai que pour les prochains mois, le tableau s’avère moins réjouissant, puisque le niveau des investissements au Royaume-Uni a considérablement baissé, tandis que, d’après les résultats de notre baromètre 2019 et les premières tendances 2020 enregistrées, les transactions franco–britanniques sont impactées de 25 à 30 %. En cas de sortie compliquée, l’économie britannique pourrai subir, toutes choses égales par ailleurs, un recul de 7 à 9 % sur cinq ans.

Au-delà de ces constatations macro-économiques, les PME–PMI prendront parfois la décision de poursuivre, voire d’accentuer leur pénétration sur le marché britannique, en fonction de l’analyse qu’elles feront de leur propre chaîne de valeur et des nouvelles conséquences fiscales ou douanières. J’ai par exemple en tête une TPE de salariés du monde du marketing direct et de la PLV, qui sous-traitait sa production de cartons en Grande-Bretagne, et qui fait désormais appel à un fournisseur allemand. Chaque cas est spécifique…

Conquérir : Pourra-t-on subir des conséquences positives du Brexit sur la France et les entreprises françaises ?

Thierry Drilhon : Le Brexit peut être une véritable opportunité dans trois domaines en particulier selon moi.

  • C'est l'occasion tout d'abord de repenser la relation économique entre nos deux pays, voire de la renforcer, là où la coopération est vivace, comme en matière de défense et d'aéronautique, tandis que la compétition restera au contraire de mise dans la pharmacie et la santé, des secteurs où le Royaume-Uni est bien implanté :
  • Le Brexit va nous permettre aussi de valoriser la France comme réceptacle d'investissements. A cet égard, la confiance étrangère n'a jamais été aussi élevée et nous arrivons même en tête de toute l'Europe actuellement de ce point de vue.
  • Revoir la gouvernance européenne, dans le cadre à 27, avec un nouveau projet. Le Brexit ne sera pas la fin de l’Union européenne. On a bien vu que le bloc des 27 ne s'est pas disloqué pendant les négociations. Ces opportunités existent aussi pour les PME–PMI, en fonction de leur analyse, car le Royaume-Uni possède une économie résiliente et des atouts importants pour son développement futur. Les services vont continuer à prospérer, en particulier dans le domaine financier.
  • La chute de la livre – de 20 % depuis 2016 – permet d’acquérir des entreprises au Royaume-Uni à moindre coût. Ce volume d’acquisitions a été multiplié par deux depuis le référendum, tandis que dans le sens inverse le nombre d’acquisitions britanniques d’entreprises étrangères a été divisé par trois.

Conquérir : Le choc va-t-il être plus rude pour le Royaume-Uni ou pour l’Union européenne ?

Thierry Drilhon : Le Royaume-Uni possède une économie très dynamique, en particulier dans le secteur des services financiers d’abord, mais aussi dans le domaine des TIC, où il est un réel pôle d’excellence.

En revanche, son industrie automobile risque de beaucoup souffrir, dans la mesure où la valeur ajoutée de sa production se place surtout à l’extérieur, puisqu’il n’a plus de constructeur national. Seuls les firmes asiatiques y investissent encore. De plus, le Royaume-Uni réalise 47 % de ses échanges avec l’UE. C’est 7 % dans l’autre sens.

A court terme, voire à moyen terme, la situation du Royaume-Uni sera sans doute assez difficile, mais je suis confiant sur son avenir économique à long terme. En attendant, je parie sur le fait que nos entrepreneurs sauront transformer le challenge d’aujourd’hui en opportunité pour demain.

Propos recueillis par Alain Gazo


Région Ile-de-France : les bénéfices du Brexit

Thierry Drilhon, président de la Chambre de commerce franco-britannique, évoque dans son interview les opportunités qu’offre le Brexit à la France.

Comme en écho des chiffres publiés récemment par Choose Paris Régions et Paris Europlace viennent confirmer ce sentiment. En effet, depuis le 23 juin 2016, 369 projets d’implantation, d’investissement, ou tout simplement de relocalisation d’équipes, ont été identifiés en relation avec le Brexit. On pouvait cependant s’en douter, près de la moitié (47 %) relèvent du secteur financier. Nettement plus loin, viennent les projets dans le domaine des activités de services et de conseils (14 %), puis ceux relevant du numérique (13%).

Fait plus significatif encore, qui témoigne du retour en grâce de la France comme lieu d’investissement, FDI Market, spécialiste du secteur, estime que la région Ile-de-France a devancé, entre 2018 et 2019, toutes les grandes régions mondiales en termes d’augmentation des IDE dans les finances, alors que le Grand Londres baissait dans le même temps de 2 %. N’enterrons pas trop vite quand même nos voisins britanniques. Ils ont de la ressource et l’ont amplement démontré dans le passé.

Quoi qu’il en soit, 369 beaux projets c’est déjà bien, d’autant que 184 prennent corps, avec près de 5 000 emplois à la clé, dont 3 500 dans des projets financiers qui, on le voit, représentent près des deux tiers de cet ensemble aujourd’hui.

On l’a indiqué supra, ces décisions ou réflexions d’implantation ou de relocalisation d’emplois sont en lien avec le Brexit. Mais quelle est la nationalité des intervenants concernés ? 46 % sont des entreprises britanniques, 18% américaines ; le Japon, la Chine et la France représentant 11 % du total.

Une accentuation de l’attention des investisseurs étrangers

Les commentateurs de l’étude envisagent – espèrent – une accentuation de ce phénomène favorable à la France, en particulier à la Région-Capitale, dans les mois ou les années à venir. Ils pointent une accentuation possible des transferts de collaborateurs de grandes banques dans l’Union européenne, mais aussi des développements favorables dans le secteur d’excellence du Royaume-Uni qui est la pharmacie, évoquant le fait que, par exemple, Sanofi a d’ores et déjà retiré la fière Albion de ses chaînes d’approvisionnement pour l’Europe. Selon ces mêmes analystes, le Royaume-Uni perdrait aussi sa place de leader dans les essais cliniques. Les échanges dans le domaine pharmaceutique, comme dans d’autres, seront tributaires des droits de douane qui seront fixés in fine.

Les atouts de la région Ile-de-France dans ce contexte sont importants. Les segments de la biothérapie, de l’oncologie et de la thérapie génique sont en plein essor. Nos instituts de recherche sont à cet égard de niveau mondial (Institut Curie, Gustave-Roussy, Institut Pasteur, Inserm…). Des pôles de recherche de haut niveau se sont développés à l’instar de Genopole, Medicen Paris, Region ou Cancer Campus. De quoi attirer l’attention des investisseurs internationaux !


Mobilité UE - Royaume-Uni : des changements notables en 2021

Quel que soit le contenu précis des 2000 pages de l'accord post-Brexit à valider début janvier, si tout va bien, des changements notables interviendront dans de nombreux domaines, en particulier en matière de mobilité personnelle, et surtout professionnelle. Les dispositions régissant la mobilité résultent de l’accord de sortie ratifié fin 2019. Les DRH devront, en particulier, être très attentifs, que ce soit en France pour intégrer des collaborateurs britanniques, et réciproquement au Royaume-Uni pour recruter des Français, et plus généralement des ressortissants de l’UE, de l’EEE ainsi que de la Suisse. On peut penser que des accords bilatéraux assoupliront certaines règles à l’avenir.

Commençant par le plus « simple », ce qui concerne la mobilité temporaire. Tout d'abord, à partir du 1er octobre 2021, un passeport en cours de validité, accompagné selon les cas d'un titre de séjour, sera nécessaire pour rentrer en France. Un visa ne sera pas nécessaire pour les séjours de moins de 90 jours. Cette dispense de visa ne concerne pas les séjours pour études ou pour le travail. Une période de transition, dont les modalités seront un peu plus souples, a été mise en place jusqu'au 30 septembre 2021. Quant aux séjours de longue durée, et sans rentrer dans trop de détails, nous dirions que la stabilité des ressortissants britanniques et français est respectée dans leur pays « d’adoption », du moment qu’ils justifient d’un séjour continu de plus de cinq ans.

Pour les nouveaux arrivants, de nouvelles règles d’immigration seront mises en place dès le début 2021, en particulier au Royaume-Uni, pour ce qui est des détachements, de la mobilité intra-groupe…

Voyons cela de manière plus détaillée. En premier lieu un visa de travail devient nécessaire. Pour faire simple, le Royaume-Uni privilégiera les emplois hautement qualifiés à partir d’une grille « à points ». La Skilled Workers Route – c’est ainsi que se nomme le dispositif, démarre seulement à partir du moment où l’intéressé a reçu une offre d’emploi – qualifié – émanant d’un parrain dûment agréé. L’acceptation du dossier est fondée sur le respect de différents critères, dont un seuil de salaire plancher annuel (25 600 livres actuellement), et un très bon niveau d’anglais. Voilà qui entraîne des frais et des délais. Autrement dit, anticipez tout cela dans le rétroplanning d'un détachement. Bien entendu, plus aucune faveur particulière n'est assurée aux ressortissants français, comme à ceux de l’UE du reste. Notons que plus de 140 000 de nos ressortissants installés au Royaume-Uni ont demandé depuis mars 2019 le bénéfice du Settled-Status (plus de cinq ans de résidence) ou du pré-Settled-Status. Les demandes en ce sens pourront être encore adressées jusqu'au 30 juin 2021. Le pré-Settled-Status permettra d'obtenir le Settled-Status au moment du dépassement de la barre des cinq ans de séjour ininterrompu.

Dès lors, les bénéficiaires auront eux aussi le statut de résident permanent autorisant à continuer à travailler, étudier… De la même manière qu’auparavant.

Vincent Gardy

Québec : une économie prospère, une recherche d'investisseurs et de main d'oeuvre qualifiée

Le Québec a un besoin criant de main-d'œuvre spécialisée. Nous l'avons encore remarqué lors des journées franco-québécoises des 30 novembre et 1er décembre derniers à Paris, où plusieurs dizaines d'entreprises de la Belle Province avaient réservé des stands et envoyé des délégations afin d’accueillir, et si possible de recruter, des personnels français ou francophones qualifiés : ébénistes, chauffeurs routiers, chefs cuisiniers... Des profils que l'on ne trouve que difficilement là-bas, nous expliquaient les exposants. En tout cas, si l’offre est là – 140 000 postes qualifiés seraient actuellement en souffrance au Québec, la demande semblait aussi de la partie, au vu de la foule qui se pressait dans les allées pour faire la queue devant les stands. 1 500 à 2 000 postes étaient à pourvoir lors de ces journées, selon Martin Dupont, directeur général de la région de Drummondville, qui avait amené de nombreuses entreprises avec lui. Nous consacrons un focus à cette région québécoise dans le présent numéro.

Un commerce franco-québecois excédentaire

Les échanges extérieurs franco–québécois s’intensifient, à la faveur d'une reprise sensible de nos exportations vers la Belle Province après des années de relative disette. Nous avons ainsi vendu en 2018 pour 2,1 milliards d'euros de biens au Québec (+14,1 % par rapport à 2017). Les observateurs remarquent que nous revenons presque ainsi au niveau record de 1999 (2,26 milliards d'euros alors).Dans le même temps, l'excédent bilatéral de notre balance commerciale s'est accrue, en raison d'un effet de ciseaux, car nos importations en provenance du Québec ont, dans le même temps, décru. Le solde positif ressort ainsi à 1,1 milliard d’euros (plus 41,7 %).
Quatre grandes catégories de produits français représentent, selon l’Institut de la statistique du Québec, trois quarts de nos ventes là-bas. Dans l’ordre, on relève tout d’abord les « produits des industries chimiques » (620 millions de dollars canadiens CAD), en hausse de 12 % par rapport à 2017. Cette catégorie comprend les produits pharmaceutiques, mais aussi les produits de la parfumerie et les cosmétiques.
En second lieu, viennent les « machines et équipements industriels » (avec 594 millions de CAD environ 21 %). On y trouve notamment les pièces destinées à l’aéronautique. Ensuite, arrive le secteur agroalimentaire (+11 %, à 588 millions de CAD), où l’on trouve le fromage, les vins…Dernière ces grandes strates, celle du matériel de transport (497 millions de CAD, +16 %). Les ustensiles de navigation des aériennes absorbent plus des trois quarts de ce montant. Si l'on regarde maintenant les importations françaises, les trois secteurs principaux sont : les produits minéraux – minerai de fer essentiellement – (455 millions de CAD), les machines et appareils (384 millions de CAD), puis le matériel de transport, (avions principalement), en nette hausse à 248 millions d’euros.
Le Québec demeure la province canadienne avec laquelle nos échanges commerciaux sont les plus denses, représentant près de la moitié du total avec le pays nord-américain à la feuille d’érable.Nous étions en 2018 le septième fournisseur international du Québec et le troisième européen (derrière l’Allemagne, puis le Royaume-Uni, mais avec très peu de différence entre nous). Tout cela loin derrière les Etats-Unis, mais aussi la Chine, et dans une moindre mesure, le Mexique.Si on regarde maintenant les exportations québécoises, nous sommes le premier client, très loin derrière les Etats-Unis (70 % de parts de marché). La Chine et le Mexique sont également devant nous, mais à des niveaux nettement plus faibles.

Drummondville : une industrie puissante, une qualité de vie plaisante

Le Québec ouvre, à travers l’Alena, à un marché de 600 millions de consommateurs potentiels, dont beaucoup à haut pouvoir d'achat… sans compter les possibilités d'exportation vers l'Union européenne, en franchise de droits de douane, grâce au Ceta.Seule région francophone, et en dehors de ses atouts propres, la Belle Province attire les Français : touristes, étudiants, travailleurs et entrepreneurs. Il est vrai aussi que le territoire est vaste, et que le Québec est désireux d’accueillir de nouveaux talents pour son économie. Le taux de chômage n'est que de 3,5 % au Québec – 5,9 % pour l'ensemble du Canada. Voilà, vous êtes convaincu de l'intérêt d'une implantation, d'un investissement, d'une expatriation ! Mais où aller au Québec ? La province représente une superficie égale à cinq fois celle de la France. Même si le Québec habité est plus restreint, vous avez cependant l'embarras du choix. Bien sûr, on pense spontanément à la ville de Montréal, ou à la ville de Québec, sa capitale. Mais il vaut mieux raisonner en termes de spécificité des régions, de leurs activités économiques dominantes – cadrent-elles ou pas avec votre projet – et de la qualité de vie.
Nous vous proposons aujourd’hui de découvrir Drummondville. Cette région compte 225 000 habitants, et se situe « au centre du Québec », concrètement à 100 km de Montréal et à 150 de la ville du Québec, selon les termes de Martin Dupont, directeur général de son agence de développement économique. « Notre économie est florissante, grâce à un entrepreneuriat dynamique », se réjouit Martin Dupont, utilisant l’expression de « paradis de la PME ».Une économie florissante, mais aussi diversifiée, orientée cependant vers l'industrie, avec un tissu de 650 entreprises manufacturières « qui font la gloire de notre ville et de notre agglomération », lance Martin Dupont.Cette industrie est diversifiée : machinerie–métal–transport (nombreux sous-traitants de Bombardier), avec 4 500 employés, aliments–boissons (2 000 employés), TI (technologies de l'information), ouvrage du bois, produits chimiques, plastique, enfin textile.Le textile, activité largement dominante dans l'industrie jusque dans les années 80, où elle occupait 50 % de la population active dans le secondaire, a chuté aujourd’hui à seulement 1,4 %.


Le calme et la technicité

Au total, la région de Drummondville compte 200 000 emplois dans le commerce et les services et 180 000 – presque autant – dans l’industrie, c’est un niveau très élevé.Il est vrai que la région de Drummondville ne ménage pas ses efforts pour la développer avec, en particulier, des investissements considérables dans des ZI modernes d’une surface totale de 20 millions de mètres carrés. « C’est que chaque emploi manufacturier amène la création simultanée de trois emplois dans le commerce et les services, souligne Martin Dupont, et que cette dynamique correspond bien au recentrage de l’ensemble du Québec sur le secteur manufacturier ». D’où la volonté du Québec d’attirer des talents. A cet égard, Drummondville présente des caractéristiques propres à susciter l’intérêt. Martin Dupont énumère quelques-unes d’entre elles : « Une ville très calme, sûre, de grands espaces, une belle qualité d’existence et un coût de la vie 20 % moins élevé que dans les grands centres ». Des infrastructures appropriées pour les jeunes, en particulier l’Université du Québec–Les Trois-Rivières permettent de compléter les éléments d’attractivité pour les familles.
42 filiales étrangères de 12 pays, dont la France, sont implantées dans la région de Drummondville. La Strasbourgeoise Soprena y emploie ainsi 300 collaborateurs. Pour ceux qui ont besoin d’un accompagnement la SDED dispose des équipes appropriées. On peut venir à Drummondville pour un job qualifié, reprendre une entreprise, mais aussi en démarrer une. Une grande pépinière d’entreprises, facilite leurs débuts – pour les start-ups comme pour les autres projets.

Australie : des opportunités d’implantations à découvrir

On a eu l'occasion en octobre de parler de la Nouvelle-Calédonie, au moment du deuxième référendum sur sa possible indépendance. Il fut un temps où l’Australie lorgnait vers ce territoire français au relatif voisinage de ses côtes. Il semblerait que cette sourde hostilité, liée aussi il fut un temps aux essais nucléaires français dans le Pacifique, soit révolue. Les échanges franco-australiens et nos IDE aux antipodes prospèrent-ils ces dernières années ? Certes oui, mais sans excès, pourrait-on répondre très succinctement.

L’Australie est un pays–continent très éloigné de l’Europe. Elle est tout naturellement essentiellement tournée vers l’Asie-Pacifique, si l’on veut bien y inclure les Etats-Unis, qui disposent d’une vaste façade donnant sur cette immense surface marine. Cet éloignement est en partie compensé par sa position élevée dans le concert des grandes nations économiques. Donc, même si notre pourcentage est petit, il n’est pas négligeable en valeur absolue.

Le stock d’IDE dans le pays des kangourous s’élève ainsi à 13 590 millions d’euros en 2019 (+17 % par rapport à 2014), malgré une baisse notable des flux de 2 188 millions d’euros*. Nous arrivons cependant loin des principaux investisseurs là-bas, lesquels sont, dans l’ordre, les Etats-Unis (151 247 millions de dollars US), le Japon (74 743), le Royaume-Uni (69 696), les Pays-Bas (34 769) et la Chine (28 305)**.

Si les augmentations de flux d’IDE avaient notablement ralenti en 2019, et il en sera encore de même en 2020, ils ont beaucoup progressé dans la période post-crise financière de 2008–2009. En 2019, l'Australie figurait ainsi à la septième place des économies mondiales, en termes d’apport d’IDE. Les stocks y atteignaient 714 milliards d’US $. Les principaux investisseurs s’avérent donc les Etats-Unis, le Royaume-Uni, la Belgique, le Japon, Hong Kong, Singapour, Luxembourg, la Chine et la France. C’est que l’Australie est classée 14e sur 190 dans le rapport de 2020 de Doing Business. L’étroitesse de son marché intérieur, son éloignement géographique par rapport à la plupart des pays du monde développé, sont compensés par le libéralisme économique, la stabilité, ainsi qu’une croissance économique continue depuis 25 ans, y compris pendant la crise financière de la fin de la précédente décennie. Son positionnement stratégique au sein d'une région Asie–Pacifique à fort potentiel, de même qu’avec les Etats-Unis, sont d’autres indéniables atouts.

La réglementation vis-à-vis des IDE est, en outre, attrayante, et vient encore d’être simplifiée. Le pays des kangourous est très ouvert au commerce international, comme en témoignent ses multiples accords commerciaux – celui en négociation avec l’UE étant en revanche toujours au point mort. Attention cependant ! Dans une démarche très pragmatique, le gouvernement de Canberra ne se gêne pas pour rejeter des propositions qui lui paraissent contraires à l’intérêt national.

Un contexte économique contrasté

Si la croissance économique a été continue pendant 26 ans, sa tonicité s’étiole cependant quelque peu. Avant même l'accident de 2020, le PIB n'avait progressé que de 1,8 % en 2019. Pour la présente année, une baisse sensible est anticipée par le FMI (-6,7 %), avant une possible remontée de pratiquement autant en 2021 (6,1 %).

Le taux d’inflation est faible, entre 1 et 2 %, et le taux de chômage à plein temps bas (5,2 % l’an dernier). Il devrait cependant remonter à 7,6 % en 2020. La dette publique n’atteignait que 41,8 % en 2019, cela fait rêver, tandis que le déficit est quasi nul. L'investissement – une fois passé le cap difficile de cette année – est sur une pente ascendante, selon les experts, en raison principalement d'une fiscalité favorable, de transferts sociaux, d'une politique monétaire « bienveillante », comme partout ailleurs, et des dépenses d’infrastructures. Parmi les éléments négatifs pour le pays des antipodes, la forte concurrence de la Chine, dont elle est de plus en plus dépendante du reste. Autre point noir, son potentiel économique interne est également érodé par le vieillissement de la population et les effets du changement climatique.

Une économie très ouverte

Pays de 25,2 millions d’habitants, immense île au bout du monde, l’Australie est logiquement extrêmement ouverte au commerce mondial. Il représente, selon les données de la Banque mondiale de 2017, 43,1 % de son PIB. Qu’exportent donc les Australiens ? Principalement du charbon et des combustibles solides (19,7 %), des minerais et concentrés de fer (18,7 %) de l’or et (5,6 %) - cette année cela rapporte, des huiles de pétrole (2,3 %), puis des minerais et des concentrés de cuivre (1,8 %).

Du côté des importations, c’est évidemment différent. On y trouve tout d’abord des huiles de pétrole (12, 7 %), des véhicules à moteur (7,3 %), des appareils de transmission pour la téléphonie (3,7 %), ou encore des machines et éléments de traitement de l’information (3,5 %).

Sa balance commerciale, structurellement déficitaire jusque vers la fin de la précédente décennie, est désormais beaucoup plus équilibrée, souvent excédentaire. Ainsi, en 2018, l’Australie a-t-elle exporté pour 325 milliards de dollars. L’excédent commercial ressort donc à 21,1 milliards de dollars et le solde global, en incluant les services, s’est établi à 17,3 milliards de dollars US toujours, selon la Banque mondiale. Les principaux partenaires sont la Chine, le Japon, la Corée du Sud, l’Inde, les Etats-Unis, l’Allemagne et la Thaïlande. Notons que l’Australie cherche à diversifier géographiquement ses partenaires, puisqu’elle négocie actuellement des accords avec le conseil de coopération du Golfe, l’Inde, le Pérou, l’Indonésie et Hong Kong.

Un bel excédent pour la France

Nous l’écrivions supra, l’Australie – certes lointaine, 37e client et 50e fournisseur, nous apporte des excédents commerciaux. Mais oui ! En 2019, nos exportations se sont ainsi élevées à 2 655 millions d’euros (+1 %) et nos importations à seulement 1 128,3 millions. D’où il ressort un excédent de 1 532,7 millions ! Nous vendons en premier lieu des machines industrielles agricoles et diverses (20 % du total), des produits des industries agroalimentaires (15,4 %), des matériels de transport (12,8 %), ou encore des produits chimiques, des parfums et des cosmétiques (12 %).

A l’inverse, notre premier poste d’achat sont les hydrocarbures naturels et autres produits des industries extractives (56 %), devant les produits agricoles, sylvicoles, de la pêche et de l’agriculture (10,7 %), puis des produits manufacturés divers (6,8 %) et des produits pharmaceutiques (5,8 %). Nous étions le 13e fournisseur de l’Australie en 2019, ils sont nos 23e clients.

 

* Source Banque de France 2019.

** Source FMI 2018.

 

De belles opportunités encore méconnues

 

John Rees est le responsable du développement en énergie du secteur défense de l’Etat d’Australie du Sud. Parfait francophone, il est également chargé de développer les implantations françaises dans cet Etat du pays-continent.

 

 « Le marché australien est beaucoup plus important pour la France qu’on ne le pense », remarque John Rees. Il cite à l’appui l’exemple d’un programme de construction de 12 sous-marins Baracuda sur place par Navagroup (anciennement DCNS). Ce programme durera cinquante ans à partir de 2023, et amène déjà bon nombre de PME sous-traitantes à s’installer sur place pour le jour J. « 38 des 40 sociétés du CAC 40 sont en Australie, poursuit John Rees, le marché est mal connu sauf par les businessmen avisés, dans des domaines aussi variés que le secteur financier, les jeux électroniques et bien sûr la défense aéronautique et navale ». Les énergies renouvelables sont également de la partie « avec plusieurs gros projets, dont celui du français Neoem, qui veut créer une ferme éolienne de 150 MgW de production et de stockage d’électricité. Alors que l’Australie exporte toujours principalement des matières premières, des opportunités existent pour les sociétés de l’agroalimentaire ou encore du secteur de la transformation de minerais, susceptibles d’apporter de la plus-value », analyse John Rees. « D’autre part, les accords de libre-échange noués par l’Australie avec pratiquement tous les pays de la zone Asie-Pacifique, dès lors des entreprises françaises implantées sur place peuvent bénéficier de ces dispositifs », conclut-il.

John Rees décrit les Australiens comme directs, sportifs et résilients. C’est particulièrement le cas en Australie du Sud, « Etat de plus en plus sec du continent le plus sec au monde ».  L’Australie du Sud, un des six Etats du pays, a donc déployé « une énorme compétence dans l’eau et l’irrigation »… et aussi dans l’élaboration de vins… parfois haut de gamme. L’activité vinicole est importante en Australie.

 


Des possibilités de rayonnement dans la zone Asie-Pacifique

 

Fernando Alves, chef du pôle Industrie Business France en Australie, et son collègue Pierre Le Queven, chargé de développement pour le département industrie*, sont des observateurs attentifs du monde économique australien et des opportunités qu’il recèle. Ils ont bien voulu répondre à quelques questions de notre rédaction.

Conquérir : Quelles entreprises, principalement les PME, ont-elles intérêt à s'implanter à Australie ?

Fernando Alves : Le paysage des opportunités d’affaires en Australie peut offrir de nombreux débouchés commerciaux pour les PME françaises détenant une expertise dans l’une des industries suivantes : la défense, les énergies (énergies renouvelables, hydrogène), le secteur du gaz, le secteur spatial, la construction et la maintenance d’infrastructures, le secteur minier, et tous les aspects tech et numériques (optimisation des procédés via des technologies innovantes).

Les PME qui disposent d’une expérience à l’export réussie dans un pays anglo-saxon (Canada, Etats-Unis, Royaume-Uni) seront également avantagées, car la pratique des affaires y est similaire, notamment en raison du pragmatisme pour conduire les affaires et les négociations. Les entreprises dont la stratégie export est basée sur la mise en place de partenariats avec des acteurs locaux, de partage de compétences ou de projets « d’Australianisation » auront les meilleurs retours sur investissement.

Conquérir : Comment les PME doivent-elles aborder le marché ?

Fernando Alves : L'Australie a perdu une partie importante de ses capacités de fabrication en 2017 lorsque l'industrie automobile a quitté le pays. Les trois plus grands constructeurs automobiles, GM, Ford et Toyota, qui employaient directement plus de 50 000 personnes (2016), ont délocalisé leurs activités commerciales à l'étranger. L'industrie australienne compte sur les capacités étrangères pour fournir des équipements de haute technologie sur ses marchés industriels.

L'Australie est l'une des nations les plus riches du monde, mais c'est l'une des économies les moins complexes, selon la récente étude de la Harvard Kennedy School of Government sur la complexité économique. Cela a de graves implications pour la sécurité et l'économie du pays (The Australian - We Lack the Will to have a Manufacturing Industry, 19 février 2020).

Le gouvernement fédéral australien souhaite donc, à travers d’immenses investissements dans des grands projets de défense, réindustrialiser une partie du pays, maximiser l’apport de nouvelles technologies et de savoir-faire étranger ainsi que créer de nouveaux emplois qualifiés. Les PME étrangères innovantes qui manifestent une réelle stratégie d’implantation ou de partenariat sont donc les bienvenues.

Il est important de noter pour les PME françaises que, dans l’industrie de défense australienne, la part locale est une exigence importante si l’on veut se positionner sur les grands contrats de construction navale et de défense (la formation, la maintenance, le SAV, l'assemblage ou la fabrication de pièces sur place). Le gouvernement australien incite les acteurs de la supply chain globale du secteur à créer des partenariats avec des entreprises australiennes. Les investissements et l’implantation physique permettront de maintenir à flot l’industrie australienne et de créer des emplois locaux dans le pays. Il est également conseillé d’établir une relation avec les grands donneurs d’ordre en local et de connaître leurs fournisseurs actuels de même que le tissu industriel australien.

Je signalerais également les défis auxquels font face les PME françaises en Australie : la distance (15 000 km, 24h d’avion), la superficie de 7,7 millions km2, soit 14 fois la France, le décalage horaire (entre 6h et 10h), la langue et un tropisme anglo-saxon. Enfin, selon le rapport Doing Business 2019 rédigé par la Banque mondiale, l’Australie est classée 14e sur 190 quant à la facilité à faire des affaires. La stabilité de l’économie australienne, la rapidité et la simplicité de développer une entreprise de manière sécurisée en font cependant un pays avantageux.

Ponctuellement, les perspectives de sortie de la crise Covid en Australie offrent de nouvelles opportunités aux entreprises françaises. Notamment avec l’émergence de nouvelles filières industrielles dans les secteurs critiques tels que :

  1. Les métaux rares via la création de chaînes de valeurs sur place pour renforcer la souveraineté du pays vis-à-vis du monopole chinois.
  2. Le développement d’une filièrehydrogène qui viendra conforter son statut de premier exportateur énergétique de la région.
  3. La continuité des investissements dans le secteur spatial (avec notamment la signature de l’accord Artemis et des investissements d’un montant de 150 M AUD pour la mission Moon to Mars)ainsi que les grands budgets d’armement.

Conquérir : L'Australie peut-elle être une base de conquête de la zone Asie-Pacifique ?

Fernando Alves : Oui tout à fait. De nombreuses entreprises s’installent en Australie pour rayonner sur la zone Asie-Pacifique. L’Australie est une puissance politique et économique ainsi qu’un acteur majeur de la région Asie-Pacifique. Le pays est complètement intégré dans l’espace économique de la zone. Canberra a notamment signé un accord de libre-échange entre l’Asean, l’Australie et la Nouvelle-Zélande, entré en vigueur en 2010 (AANZFTA).

Douze des quinze plus grands partenaires commerciaux de l’Australie se trouvent en Asie et en Océanie, générant une valeur commerciale d'environ 577 Mds AUD en 2018-19 – ses trois premiers clients étant la Chine, le Japon et la Corée du Sud, notamment portés par les besoins en matières premières de ces derniers (ressources agricoles).

En 2019, 79 % des exportations australiennes étaient destinées à la zone Apec (Coopération économique pour l'Asie-Pacifique), 11,8 % à l’Asean et 7,1 % à la zone Euro, tandis que 66,6 % des importations australiennes provenaient de l’Apec, 19,2 % de la zone Euro et 16,2 % de l’Asean.

Conquérir : Pouvez-vous fournir quelques exemples de PME françaises qui ont fait le choix de l'Australie et qui y connaissent le succès ?

Fernando Alves : Certaines PME françaises ont choisi l’Australie comme premier pays pour implanter leur filiale, notamment Squad (entreprise de cyber sécurité) ou Probent (ingénierie et fabrication de composants). Elles ont notamment été portées par le contrat des sous-marins, remporté par le constructeur français Naval Group, s’élevant à plus de 80 Mds AUD.

 Un certain nombre de PME ont également signé des contrats de distribution/partenariat avec des acteurs locaux (Souriau, Socitec, Pinette), ont créé une entité locale (Fiva, Predict, Adexflow) ou ont choisi la formule du VIE pour prospecter le marché (Qos Energy, Probent, LGM, Neoen).

*La directrice de Business France Australie est Armelle Rebuffet.

Propos recueillis par la rédaction de Conquérir

Brésil : des perspectives intéressantes

Le Brésil est la première puissance économique d’Amérique latine, mais aussi le pays le plus vaste et le plus peuplé. Il est donc particulièrement digne d’intérêt pour la France, surtout sur le plan des affaires. Le sujet est souvent traité d’une manière caricaturale, en tous cas dans les « grands médias ». Aussi avons-nous décidé de réaliser pour vous une synthèse macro-économique et micro-économique sur la situation exacte du Brésil, ses perspectives, ainsi que, bien entendu, les opportunités qu’il offre pour nos entreprises.

On parle ou on écrit beaucoup sur le Brésil à propos de présidents destitués corrompus, voire déjà condamnés, comme Lula. Ou encore du nouveau chef de l’exécutif, Jair Bolsonaro, qui n’a pas beaucoup d’amis dans la presse occidentale, mais qui a cependant été largement élu par ses concitoyens à l’automne dernier.
Quoi qu’il en soit, le Brésil demeure une des super-puissances dites émergentes. Son industrie est solide et suffisamment diversifiée. Le pays dispose en outre de ressources minérales et agricoles considérables et diversifiées.
Très mal placé en revanche dans le fameux classement « Doing business » (125e rang sur 170 en 2017), l’ancienne colonie de l’Empire portugais fait cependant des efforts en matière de transparence et de lutte contre la corruption.
Son endettement est assez important (78 % en 2019) et à la hausse. Cependant, les créances seraient en grande partie détenues par des investisseurs domestiques. Comme les réserves de change couvrent actuellement plus de deux ans d’importations, on voit qu’il n’y a pas péril en la demeure de ce point de vue-là, même si la charge des intérêts de la dette plombe le solde public (9 % en 2016 au moment du pic de la crise économique, 6 % aujourd’hui).
Notons que les banques qui réalisent de bonnes marges dans un contexte de taux d’intérêt très élevés, semblent solides. Cependant, l’inflation demeure soutenue (4,2 % prévus cette année par Coface) et contrecarre l’amélioration de la compétitivité apportée par la dépréciation du Real.
Le nouveau gouvernement souhaite s’atteler à différentes réformes, d’inspiration libérale, comme celle des retraites, dont les comptes sont largement déficitaires. Il désire également privatiser plusieurs entreprises du secteur afin, principalement, de désendetter l’Etat et d’améliorer le solde public.
Le retour à une relative stabilité politique s’ajoute à ces évolutions pour contribuer à une hausse de la croissance, estimée à 2,5 % en 2019, après une quasi-stagnation durant les trois années précédentes et un fort recul de 2014 à 2016.
Malgré tout, le chômage reste élevé (plus de de 10 % de la population active). Peut-être parce que, comme l’analyse Coface, les coûts de production, particulièrement salariaux, sont élevés et le système éducatif inadéquat pour former des personnels qualifiés.

France-Brésil : un commerce extérieur excédentaire

Le commerce bilatéral franco-brésilien nous est favorable. Certes, le Brésil n’est que notre 22e client, mais il est le premier en Amérique du Sud, et – qui plus est – nous procure un solde positif. C’est assez rare pour être souligné.
Après une baisse liée aux difficultés économiques de notre partenaire, nos ventes avaient atteint 4 514,8 millions d’euros en 2018 (+8 %), face à des importations valorisées à 3 011,9 millions d’euros (+2 %). Dès lors, notre excédent ressortait à1 502 millions.
Business France souligne que le profil de nos exportations vers le Brésil est « […] plus qualitatif que vers le reste du monde, avec 94% de biens à contenu de moyenne et haute technologie (21 %) ». Du côté des importations en revanche, le Brésil nous expédie essentiellement des produits primaires et fossiles (31,5 %), des matériels de transport (34 %), des équipements technologiques (21 %), des produits de l’industrie agro-alimentaire (27 %) ou encore semi industrialisés comme le bois et le papier (16 %).
Nous avons toujours figuré parmi les premiers fournisseurs du Brésil ces dernières années, et troisième parmi les pays de l’UE, derrière l’Allemagne et l’Italie, avec une part de marché plutôt en baisse, autour de 2,5%. 

Un stock français d’IDE significatif

On sait que nos géants tricolores ont investi au Brésil et d’une manière importante, cela depuis de nombreuses années (Carrefour, Renault, Legrand…). Dans ces conditions, la France est statistiquement le 5e investisseur dans le pays amazonien depuis 2010 en termes de stock d’IDE (28,5 milliards de dollars US). Cela représente 6 % des IDE là-bas, derrière les Pays-Bas, les USA, l’Espagne et le Luxembourg. Comme une partie des investissements tricolores ont « transité » par les Pays-Bas et le Luxembourg, Business France estime que les IDE d’origine française devraient plutôt se situer « à la troisième ou à la quatrième place » en stock.
En termes de flux, le Brésil est le premier pays émergent destinataire actuel de nos flux et le 11e mondial. Localement, nous sommes actuellement comptés en 6e position des flux entrants, derrière l’Allemagne. 52 % des stocks français d’IDE sont affectés au secteur des services, 25 % à la finance, 12 % à l’automobile, 10 % au commerce de détail, mais surtout 35 % à l’industrie manufacturière et 9 % à l’industrie extractive.


Au-delà des idées reçues

Cela fait du bien de s’entretenir avec des personnes qui sont sur le terrain, loin des clichés administrés par les grands médias. Leur aveuglement, criant dans l’affaire Dupont de Ligonnès, l’est tout autant dans l’analyse de la situation internationale. Ainsi en est-il pour le Brésil, où le président Jair Bolsonaro – il ne s’agit pas ici de le défendre – est accusé de faire brûler la forêt amazonienne en raison de décisions qu’il aurait prises depuis son arrivée au pouvoir en janvier dernier.
Or, et c’est là un point faible du Brésil pour ceux qui veulent s’y implanter, tout est très lent sur le plan administratif, y compris les mesures mises en place par tout le gouvernement. Ainsi Nathalie Vanegas, qui est agent sur place de Tifanette, société qui exporte des fruits frais français à travers le monde et en particulier en Europe du Sud, nous le confirme en ces termes : « le nouveau Président avait promis, à son arrivée au pouvoir, de réduire les impôts sur les entreprises qui exportent et nous attendons toujours ».
D’une manière générale, « le Brésil est compliqué du point de vue administratif; on n’ouvre pas une société en 48 heures comme aux Etats-Unis », remarque-t-elle. Cet inconvénient est en revanche, un avantage pour ceux et celles qui sont plus persévérants, comme Nathalie Vanegas, puisque la concurrence sur un même créneau en est freinée.
Cependant, note-t-elle, « les habitants sont enthousiastes, énergiques, en particulier dans le monde des affaires et il existe dans ce pays immense de nombreuses opportunités de business ». Elle relève de plus que « le relationnel s’avère plus simple qu’en France, se traduisant par un accès plus aisé au sommet de la hiérarchie des entreprises ». Quant aux étrangers, « ils sont bien accueillis ». En tout cas, Nathalie Vanegas s’y est plue, puisque, après deux ans passés comme VIE à Sao Paolo, elle est revenue s’y installer en février dernier et est devenue l’agent pour le Brésil et une bonne partie de l’Amérique du Sud de Tifanette, son entreprise d’accueil lorsqu’elle était VIE. Ses clients sont des importateurs, des grossistes, des supermarchés, auprès desquels elle commercialise des fruits frais, traditionnels ou bio.
En sens inverse, elle contribue à l’exportation de fruits tropicaux en Amérique du Nord, en Europe, en Russie et même en Asie.
Recherchant désormais « un portfolio plus ample », elle veut monter une société de négoce, plus adaptée au développement de ses activités, en association avec un ancien transitaire spécialisé, toujours dans le domaine agro-alimentaire, vocation de Nathalie Vanegas depuis ses études à l’agro-campus de l’université de Rennes.


GOL : un acteur majeur du transport aérien au Brésil

Conquérir : Pouvez-vous nous faire une présentation générale de la compagnie (lignes opérées, nombre d'avions...)

Eduardo Bernades : GOL est la plus importante compagnie aérienne au Brésil, transportant plus de 33 millions de clients par an. Elle est aussi leader sur les marchés du tourisme de loisir et du tourisme d’affaires dans le pays. En 18 ans d’histoire, la compagnie aérienne a joué un rôle clé dans la démocratisation du transport aérien au Brésil. Actuellement, elle propose 750 vols quotidiens vers 76 destinations - au Brésil, en Amérique du Sud, dans les Caraïbes et aux États-Unis - avec une flotte standardisée de 127 Boeing 737. La compagnie a des alliances stratégiques avec Air France et KLM, en plus d'offrir aux clients 12 accords de partage de codes et plus de 80 accords interlines, apportant ainsi plus d’opportunités et facilitant les correspondances vers les destinations desservis par ces partenariats.
#NovaGOL renforce ce concept en présentant une entreprise leader sur différents aspects: sièges confortables, connectivité et divertissement, offrant la plate-forme la plus complète avec Internet, des films et une télévision en direct gratuite ; une offre de salons VIP pour les vols domestiques et internationaux, le meilleur programme de récompenses sur le marché (Smiles), et un service client reconnu et récompensé par divers organismes, telles que l'ANAC (Agence nationale de l'aviation civile du Brésil), le site Web de défense des consommateurs Reclame Aqui et le Forum brésilien des relations avec le client. En ce qui concerne le transport de marchandises et la logistique, GOLLOG permet l’acquisition, la distribution et la livraison de colis pour diverses régions du pays et à l’étranger. En interne, GOL s'appuie sur une équipe de 15 000 professionnels de l'aviation, des employés hautement qualifiés et soucieux de la sécurité, qui constitue la valeur numéro un de la compagnie aérienne.

Conquérir : Pouvez-vous évoquer votre partenariat avec Air France et les avantages pour les voyageurs professionnels, en particulier se rendant au Brésil ?

Eduardo Bernades : En partenariat avec Air France- KLM, nous disposons de la meilleure combinaison de services et de produits, avec une synergie commerciale et un réseau intégré. Ensemble, les compagnies couvrent plus de 99% de la demande entre le Brésil et l'Europe. Il existe plus d'un millier de vols en partage de code dans 18 pays différents. En outre, nous venons de terminer cinq années de partenariat fructueux et stratégique, noué avec le partenariat et la collaboration d’équipes commerciales, alliances et aéroports. Plus de 1,5 million de passagers ont été transportés au cours de cette période. Et à la suite de ce partenariat, les compagnies ont lancé il y a un an un hub stratégique commun à Fortaleza, dans le nord-est du Brésil.


Conquérir : Avez-vous des nouveautés particulières à nous indiquer pour les prochains mois ?

Eduardo Bernades : Au cours des cinq dernières années, GOL a beaucoup investi dans des solutions offrant davantage de bénéfices, rationalisant les processus, optimisant les délais et offrant plus de commodité aux voyageurs d'affaires. Par exemple, les clients ont une meilleure expérience à bord, avec des sièges plus ergonomiques, plus spacieux et plus confortables. La plate-forme de divertissement et de connectivité la plus complète (GOL Online), i comprend une connexion Internet pendant tout le vol vers toutes les destinations du pays et de l'étranger. Télévision en direct et films gratuits. La compagnie propose également une prise USB pour recharger tous les appareils pendant le vol, ainsi, les voyageurs d'affaires ne sont jamais déconnectés, des salons VIP (salons GOL Premium) situés dans les terminaux nationaux et internationaux de Sao Paulo et de Rio de Janeiro. En outre, GOL propose également des fonctionnalités telles que l'application mobile pour la gestion des voyages et des avantages exclusifs pour les clients Diamond (programme de récompenses Smiles) et l'embarquement prioritaire.
En particulier pour les petites et moyennes entreprises, GOL a lancé VoeBiz en partenariat avec Air France et KLM, qui permet à la société/client ainsi qu’aux collaborateurs de gagner des points lors de leurs déplacements professionnels et de les échanger contre de nouveaux billets. Aujourd'hui, ce programme regroupe plus de 15 000 petites et moyennes entreprises enregistrées. GOL compte également 500 contrats d'entreprise bénéficiant de son réseau et d'accords mondiaux, qui offrent des voyages encore plus intégrés à travers le monde et constituent la meilleure solution pour les voyageurs d'affaires. GOL a également des équipes dédiées pour assister les voyageurs d’affaires et dispose du meilleur taux NPS, qui mesure la satisfaction des voyageurs d’affaires.
Ces produits et services sont également associés à un réseau robuste, avec des correspondances plus rapides et plus efficaces dans les principaux hubs (GRU, GIG, BSB, FOR) avec des horaires adaptés, en plus de partenariats avec des sociétés régionales telles que Passaredo et Two Flex, ainsi qu’avec des compagnies internationales comme Air France et KLM.

Conquérir : Parlez-nous de vos produits, avant tout, ceux destinés aux voyageurs d'affaires.

Eduardo Bernades : Toujours en recherche de compétitivité, GOL évalue en permanence de nouvelles opportunités, pour offrir encore plus d’options de vol à ses clients. GOL a connu une augmentation importante de son réseau, en particulier au cours du dernier trimestre, avec des investissements dans les principaux hubs - GRU (aéroport international de São Paulo), GIG, (aéroport International de Rio), BSB (aéroport de Brasilia), CGH (principal aéroport domestique à Sao Paulo)afin de renforcer les activités nationales et internationales. En juillet, GOL a lancé le vol direct Brasilia-Cancún ainsi que la route reliant Recife à Santiago (Chili) - GOL est la seule compagnie aérienne à relier le nord-est à la capitale chilienne. Les attentes pour le second semestre de l’année sont très positives pour GOL, tant dans le secteur des loisirs que dans celui de l’activité, où l’entreprise est le leader du marché. En décembre, GOL lancera de nouveaux vols entre São Paulo et Lima (Pérou).

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