Relations sociales

Harcèlement moral

 

Le harcèlement moral est un phénomène redoutable, à la fois pour les salariés qui en sont victimes que pour les employeurs dont les commettants sont suspectés de s’y livrer. Les patrons se trouvent pris entre le marteau et l’enclume. S’ils sanctionnent ce dernier, ils seront probablement assignés aux Prud’hommes, de même le seront-ils par la « victime » s’ils n’agissent pas. Nous nous placerons là, pour faire le point sur cette question, du côté des problématiques soulevées par la question de la personne harcelée.

 

Rappelons tout d’abord que l’employeur a une obligation générale de sécurité de résultat. Cela est vrai en matière de harcèlement moral avéré. Elle ouvre droit, du simple fait qu’elle n’a pas été tenue, à une réparation. Cette réparation peut être allouée à un triple titre, respectivement ceux résultant des dommages causés, du manquement à l’obligation de prévention, ou encore au préjudice consécutif à la perte d’emploi.

Cette perte d’emploi est assez fréquente en cas de harcèlement moral, soit en raison d’un licenciement du salarié concerné pour inaptitude, de sa prise d’acte, ou d’une rupture conventionnelle. La rupture conventionnelle est à prendre avec des pincettes, puisque le salarié est susceptible ultérieurement  de plaider que son consentement a été vicié en raison d’un état de santé mentale souvent altéré.

Quoi qu’il en soit, à la barre des tribunaux, le salarié devra présenter des éléments tendant à prouver qu’il y a bien eu harcèlement. A cet égard, il devra apporter des éléments à l’appui de son argumentation, relatifs à la répétition des actes de harcèlement, ainsi qu’aux conséquences supposées.

Un certificat médical ne peut évidemment établir de lien entre un état de santé défaillant et une cause interne à l’entreprise. Mais il est important qu’il figure dans le dossier. S’il est établi par le médecin du travail interne à l’entreprise, il aura sans doute plus de poids, puisque le praticien a davantage connaissance du terrain où exercent le salarié et ses harceleurs putatifs.

 

Une suspicion de harcèlement moral

 

Le juge judiciaire va, se fondant sur les éléments de fait, déterminer si, à ses yeux, il existe une suspicion de harcèlement moral. Lorsque c’est le cas, il va inverser la charge de la preuve, une fois les faits exposés par le salarié. Il revient alors à l’employeur de présenter des arguments étayant l’absence de harcèlement moral. Oui, mais quid de la situation où il a tout fait pour résoudre le problème, limité qu’il est parfois par les contraintes liées à l’organisation du travail ou à la nécessaire protection de ses commettants présumés - mais seulement présumés, harceleurs !

Hervé Gosselin, ancien conseiller à la Chambre sociale de la Cour de cassation, se montre d’emblée assez pessimiste pour l’employeur dans la Semaine sociale Lamy du 25 janvier dernier. D’une part, il rappelle que « le harcèlement moral peut être caractérisé indépendamment de la volonté de son auteur ». Ce qui évidemment ouvre un large champ aux réclamations. D’autre part, la seule prévention n’exonérera que difficilement  l’employeur. En effet, analyse Hervé Gosselin « […] lorsque le harcèlement moral est intervenu […] la prévention a été à l’évidence défaillante ».

Cependant, le patronat peut compter sur une plus grande souplesse récente de la Cour de cassation en matière d’obligation de sécurité de résultat. Mais il faudra qu’il agisse vite et saisisse tous les organes internes de la société (médecin, du travail, CHSCT…). Une course de vitesse qu’un employeur a gagnée devant la Chambre Haute le 3 décembre 2014. Les hauts magistrats concluent cet arrêt en indiquant « […] la cour d’appel a pu […] déduire [de ses diligences] que l’employeur n’avait pas manqué à son obligation de sécurité ». Et pourtant, le résultat n’ était pas là.

Gageons que la jurisprudence va encore évoluer ces prochaines années, car la ligne semble devenue fluctuante dans ce domaine.

 

Vincent Gardy

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